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PRÉHISTOIRE La taille expérimentale des roches dures

Pourquoi expérimenter ?

Expérimenter pour mieux connaître. Les outils de pierre, souvent en roches siliceuses, sont les objets les moins destructibles d'un gisement. Il est primordial d'atteindre à la connaissance des techniques et méthodes inventées par les hommes préhistoriques pour les produire, car nous cernerons alors les intentions, avec une possibilité permanente de vérification. Les buts principaux sont, ou ont été, les suivants :

Des mythes à détruire. Ainsi l'homme acheuléen taillant et retaillant pendant de longues journées pour obtenir quelques outils. En fait, il ne faut guère plus de deux ou trois minutes pour obtenir un biface et quelques dizaines de secondes pour un racloir. Il en est tout autrement pour certaines pièces beaucoup plus élaborées comme les feuilles de laurier solutréennes ou les pièces bifaciales obtenues à l'aide de longues retouches par pression.

Des techniques à redécouvrir. Depuis L. Coutier et F. Bordes, on sait qu'une matière plus tendre que le silex (bois de renne, bois d'arbre, par exemple) permet de détacher des éclats très minces, « pelant » véritablement la roche, donnant ainsi la possibilité d'obtenir des pièces plus plates, mieux équilibrées, avec des bords tranchants plus fins que ceux qui résultent de la taille au percuteur de pierre.

Des intentions à percer. Il faut discerner ce qui est accidentel ou trace d'utilisation de ce qui est intentionnel, ce qui est facile de ce qui est difficile, ce qui est essentiel de ce qui est superflu, ce qui advient spontanément au moment du détachement d'un éclat de ce qui est une reprise, une « retouche ». On comprendra aussi par l'expérimentation si le caractère fruste, l'aspect « archaïque » d'un ensemble lithique, est dû ou non aux possibilités limitées d'un matériau.

Des chaînes techniques à retrouver. C'est, en effet, la connaissance empirique des lois régissant la propagation des ondes de fracture dans un solide qui est à la base des techniques de taille des roches dures. Ces techniques, comme la percussion directe au percuteur minéral, la percussion indirecte, au percuteur animal (os, bois, corne, ivoire) ou végétal, le « coup du burin », etc., peuvent être symbolisées par la main de l'artisan. Les méthodes, agencement de différentes techniques suivant un enchaînement raisonné, sont l'esprit, le cerveau de la réalisation d'un outil. Si l'on ajoute le style, qui est lié à la tradition, on peut définir la morphologie d'une pièce à l'aide de ces trois éléments : la technique (la main), la méthode (le cerveau) et le style (la tradition).

La lecture d'une pièce, fondement immuable à toute connaissance typologique, devra donc être la reconnaissance, d'après les stigmates visibles, des différentes techniques, agencées suivant telle ou telle méthode, donc employées dans tel ou tel ordre chronologique, pour obtenir la morphologie existante, empreinte d'un certain style.

Cette lecture ne peut plus se passer de l'apport énorme des expériences de taille. Tout préhistorien doit avoir, sinon beaucoup taillé, tout au moins avoir acquis la maîtrise de quelques techniques fondamentales, ou, au pire, avoir beaucoup vu tailler.

Des connaissances à transmettre. Ceux qui abordent la préhistoire comprendront mieux, plus vite et de façon plus durable s'ils ont acquis les notions de base grâce aux démonstrations d'un enseignant expérimentateur. Le fait est irréversible : la préhistoire ne pourra plus jamais ignorer les expériences de taille.

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    préhistorique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Contraintes et réussites des outils de l'homme préhistorique

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