PRESBYTRE
Le mot grec presbutéros (l'« ancien » ou l'« aîné ») n'est souvent qu'un qualificatif, mais il revêt aussi un sens plus technique et devient un substantif. Du grec classique il passe dans la littérature judéo-chrétienne, où le presbytre joue un grand rôle.
En Asie Mineure et en Grèce, il garde un sens ordinaire même lorsque l'on confie le gouvernement des cités à des personnes d'expérience. C'est en Égypte qu'il désigne plus précisément le groupe des représentants d'une communauté. Chez les Juifs, il prend un sens précis qui s'enracine dans la Bible : il évoque les soixante-dix anciens (Nombres, xi). Cela est vrai surtout du judaïsme palestinien, alors que dans la Diaspora le vocabulaire est plus flou. Le presbytre juif appartient à un collège responsable d'une communauté ; son rôle se réfère notamment à la connaissance de la Torah.
Avec l'avènement du christianisme, le mot prend peu à peu un sens rigoureux, le presbytre s'y voyant confier dans les communautés un rôle mieux défini de ministère.
Les Actes des Apôtres évoquent deux sortes de ministères. L'un, missionnaire et itinérant, consiste d'abord à porter la bonne nouvelle ; il est dévolu aux apôtres et aux prophètes. L'autre est local : un groupe d'anciens, souvent institués par les apôtres, assume un service spirituel et disciplinaire ; parfois, ils ont aussi la responsabilité des biens matériels et des aumônes ; ils sont alors appelés « surveillants » (épiscopoi).
Les Épîtres pauliniennes authentiques ignorent le vocable « presbytre ». Paul donne des directives morales et liturgiques ; il recommande de respecter le ministère de la parole (prophétie) et emploie de nombreux autres termes pour désigner les services de la communauté. C'est sans doute pour marquer ses distances à l'égard des judéo-chrétiens que Paul ne parle pas de presbytres. Ce mot ne figure pas non plus dans la Didachè ni dans les descriptions de la communauté d'Antioche, centre missionnaire auprès des païens. On le trouve, par contre, dans les lettres de Pierre, de Jacques, de Jean, ainsi que dans les épîtres dites pastorales attribuées à Paul, et il est utilisé à Rome pour désigner les chefs de l'Église locale.
Dans la lettre que Clément de Rome adresse aux chrétiens de Corinthe au sujet de leurs déchirements internes (fin du ier s.), les presbytres sont des chefs (hégouménoi), auxquels il faut être soumis (hypotassoménoi), qu'il convient d'honorer et dont le rôle, local encore, est pastoral et cultuel ; ils ont été établis par les apôtres ou leurs collaborateurs avec l'assentiment de la communauté.
Au cours de toute la période fondatrice de l'Église, le vocabulaire reste incertain ; on ne trouve pas des presbytres partout et la fonction n'est pas encore clairement délimitée. Ce n'est qu'à l'époque des lettres d'Ignace d'Antioche (première partie du iie s.) que la hiérarchie (évêques, presbytres, diacres) est établie.
L'histoire de cette institution montre qu'un service (diaconia), sous quelque forme que ce soit, est indispensable à la vie d'une Église qui ne peut, en effet, rester purement spirituelle. Toutefois, cette histoire laisse percevoir aussi les fluctuations et incertitudes du rôle de presbytre, ainsi que la diversité des situations dans lesquelles il s'inscrit et qui tiennent au lieu, à l'origine des membres de la communauté (païens ou juifs), aux dons particuliers des fondateurs. Le presbytre, dans le christianisme, est devenu le prêtre, le sacerdoce classique faisant oublier par la suite la variété des modes selon lesquels avait choisi de vivre et de s'organiser l'Église primitive.
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Écrit par
- Marie-Odile MÉTRAL-STIKER : docteur en philosophie
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