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PRESSE DU CŒUR ou PRESSE SENTIMENTALE

Un lectorat populaire

En 1955, selon l’Office de justification des tirages, la diffusion de la presse du cœur, dans sa version hebdomadaire, atteint près de quatre millions d’exemplaires avec ces six titres : Nous Deux, Confidences, Intimité, Secrets de femmes, Rêves et La Vie en fleur. Seize millions de Français lisent un titre de la presse du cœur : chaque exemplaire est lu au moins par quatre personnes. En effet, une bonne partie de ces périodiques ne sont jamais datés de façon apparente, ce qui rend leur durée de vie d’autant plus longue. Ils passent de main en main, dans les salons de coiffure, les salles d’attente de médecins, les bureaux, les hôpitaux et les casernes. Lue par 41 p. 100 d’hommes et 59 p. 100 de femmes, même si elle est avant tout achetée par celles-ci, la presse du cœur s’inscrit comme une lecture familiale, touchant toutes les générations, avec une légère prépondérance des 25-34 ans. Ce public est fidèle et lit plusieurs titres similaires. Les lecteurs vivent surtout en zone rurale, 60 p. 100 habitent dans des villes de moins de 10 000 habitants. Ils ont un niveau d’étude primaire. Les ouvriers constituent près de la moitié des lecteurs et les employés plus de 10 p. 100. Rappelons qu’en 1960 ouvriers et employés forment 58 p. 100 de la population active française. Ces deux catégories professionnelles forment l’essentiel du lectorat de la presse sentimentale ; elles recherchent une lecture de distraction et de délassement. Ces lecteurs sont sensibles aux formes et aux contenus, car ils éprouvent le besoin de lire sans être déconcertés, leurs compétences lectorales étant limitées. À ce titre, la couverture, la maquette et la typographie sont des marqueurs qui permettent de repérer facilement ce type de publication. Le texte doit être facilement compréhensible pour parvenir sans détour à l’histoire. Les contenus et la présentation restent stables car ce public apprécie la continuité et se montre lui-même fidèle dans ses choix.

Un autre public de la presse sentimentale est incontournable, mais plus inconstant : il s’agit des adolescents. Jusqu’en 1960, toutes les jeunes filles et beaucoup de garçons lisent ces magazines. Les rares adolescents qui ne s’aventurent pas à les feuilleter sont ceux qui respectent la condamnation absolue posée par leurs parents ; ils sont issus de milieux intellectuels, politisés ou religieux. Toutefois, ils restent nombreux à passer outre ces interdictions et à les lire en cachette. Mais, à la fin des années 1950, les jeunes délaissent la presse sentimentale pour se tourner vers la musique rock, la presse « yé-yé », et une culture toute générationnelle. Salut les copains supplante Nous Deux.

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Écrit par

  • : docteure en histoire culturelle, conservatrice en bibliothèque, responsable de formations et enseignante au Pôle Métiers du livre de l'université Paris-ouest-Nanterre-La Défense

Médias

La presse du cœur : <it>Nous deux</it> - crédits : D.R.

La presse du cœur : Nous deux

La presse du cœur : <it>Intimita</it> - crédits : D.R.

La presse du cœur : Intimita

La presse « people » - crédits : G. Mouly-Héras

La presse « people »