Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

PRESSE Journalisme et journalistes

Les logiques des productions journalistiques

Le poids des impératifs commerciaux

Les transformations sociographiques de la population des journalistes se combinent avec une série de changements majeurs de l'économie générale des médias, produisant des effets sur les pratiques et le traitement de l'information. Le surcroît d'autonomie conquis par les journalistes de l'audiovisuel public à l'égard du pouvoir politique, notamment depuis les années 1980, la privatisation de TF1 et le développement de nouvelles chaînes de télévision privées ont favorisé un renforcement des logiques commerciales, celles-ci devenant dominantes par rapport aux logiques politiques. L'économie générale des médias, du fait notamment du poids croissant que le marché publicitaire fait peser sur leur fonctionnement, est profondément bouleversée par la domination de quelques grands groupes, travaillant dans le secteur de la publicité et de la communication, des télécommunications, des travaux publics, de la distribution de l'eau, de l'armement et ayant des marchés avec l'État, ou encore dans le secteur du luxe. Les chiffres d'affaires annuels et les instruments de mesure de l'audience sont ainsi devenus primordiaux dans les jugements professionnels. L'intensification de la concurrence économique affecte aussi les chaînes publiques, celles-ci étant elles-mêmes contraintes à recourir de plus en plus à la publicité et aux parrainages. Le développement des journaux « gratuits » et du brand content, c’est-à-dire de contenus produits pour une marque dans une logique de marketing, notamment sur certains sites d’information en ligne, sont d’autres formes visant à capter des ressources commerciales et qui troublent la frontière entre journalisme et communication publicitaire.

Pour autant, la prégnance des logiques économiques dans le champ journalistique ne se résume ni à la seule analyse économique (répartition du capital, chiffres d'affaires, etc.), ni aux dénonciations qui, empruntant à la vulgate marxiste, laissent souvent croire, pour aller vite, que les journalistes ne seraient que « les marionnettes » de quelques « grands groupes capitalistes ». Les contraintes économiques sont certes très visibles quand des journaux, des stations de radio ou des chaînes de télévision traitent d'« événements » dans lesquels un de leurs dirigeants, ou un proche de celui-ci, ou bien encore un de leurs gros annonceurs est impliqué. Elles sont aussi très flagrantes dans certains secteurs comme le sport professionnel ou le cinéma parce que des médias participent directement à l'organisation des spectacles. Cependant, ces contraintes en cachent d'autres, plus quotidiennes et moins visibles, qui sont en fait une retraduction de la logique économique et/ou politique. L’une des plus centrales depuis les années 2000 est la réduction considérable de la taille des rédactions, tout particulièrement sous l’effet des plans sociaux et des changements de propriétaires. Julia Cagé montre dans une étude sur 25 titres de la presse quotidienne régionale française que, si le nombre moyen de journalistes dans ces rédactions est passé de 30 en 1980 à plus de 50 à partir de 2000, il chute depuis 2008. La même auteure cite également le cas révélateur du newsmagazine LExpress, dont les effectifs ont été divisés par trois depuis 2013 et comptent, en 2016 comme en 1965, 40 journalistes.

Les développements technologiques et leurs effets

Le développement des médias audiovisuels – notamment des chaînes de télévision ou des stations de radios d'information en continu –, l'intensification de la concurrence économique à partir des années 1980, et plus encore l’émergence de l’information en ligne dans la décennie 2000 ont profondément bouleversé les conditions du travail journalistique. Ces transformations s'expliquent[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Autres références

  • LE SIÈCLE DE LA PRESSE 1830-1939 (C. Charle)

    • Écrit par
    • 1 084 mots

    L'histoire retracée par Le Siècle de la presse 1830-1939 (Seuil, Paris, 2004) a la couleur d'une synthèse érudite. Et ce n'est pas là le moindre de ses mérites. Christophe Charle ne s'était pas encore signalé comme spécialiste de l'histoire de la presse française. Mais comment ses précédents...

  • 1848 ET L'ART (expositions)

    • Écrit par
    • 1 189 mots

    Deux expositions qui se sont déroulées respectivement à Paris du 24 février au 31 mai 1998 au musée d'Orsay, 1848, La République et l'art vivant, et du 4 février au 30 mars 1998 à l'Assemblée nationale, Les Révolutions de 1848, l'Europe des images ont proposé une...

  • AGENCE FRANCE-PRESSE (AFP)

    • Écrit par et
    • 600 mots

    L'Agence France-Presse est la première agence de presse généraliste francophone et la troisième du monde, derrière, Associated Press et Reuters. Héritière de l'Agence Havas fondée en 1932, elle est créée, à titre provisoire, par une ordonnance du 30 septembre 1944 et dotée d'un statut spécial définitif...

  • AGENDA POLITIQUE, sociologie

    • Écrit par
    • 548 mots

    La «  mise à l’agenda » concerne la question des « effets » des médias sur le débat public et sur les électeurs, et en particulier lors des moments de « surchauffe symbolique » que sont les élections. Maxwell McCombs et Donald Shaw ont formulé en 1972 le principe suivant : il se peut que la presse...

  • ALGÉRIE

    • Écrit par , , , et
    • 41 835 mots
    • 25 médias
    ...l’étranger, Berbère Télévision (Paris) ou Al Magharibia (Londres), une chaîne islamiste lancée par le fils d’Abassi Madani, qui vit au Qatar. Le pays dispose de titres de presse nombreux, peu onéreux et donc encore assez lus. Les Algériens achetaient souvent trois ou quatre journaux par jour au début de la décennie...
  • Afficher les 110 références