PRÊTRE, christianisme
Pour le christianisme ancien, comme pour les Églises orthodoxe, catholique et anglicane d'aujourd'hui, le presbytérat est, avec l'épiscopat et le diaconat, l'un des trois ministères conférés par une ordination sacramentelle pour exercer une responsabilité originale à l'égard de la parole de Dieu, de la célébration liturgique et, plus spécialement encore, de la construction de l'Église.
Le vocabulaire du Nouveau Testament ne permet pas de reconstituer avec précision l'évolution qui a conduit à la distinction entre presbytérat et épiscopat. Elle ne devient nette que vers 150. Depuis lors, les presbytres apparaissent comme constituant un collège subordonné à l'évêque unique, avec lequel ils collaborent étroitement. En revanche, le même vocabulaire révèle que le Nouveau Testament ne conçoit pas le presbytérat (ou l'épiscopat) dans la ligne du sacerdoce, ce que les traductions françaises ne peuvent rendre, puisqu'elles ne disposent que de l'unique mot « prêtre » (du grec, presbutéros) pour traduire deux termes bien distincts en grec : hiéreus (sacrificateur cultuel, médiateur entre Dieu et les hommes) et presbutéros (ancien de la communauté, sans connotation sacerdotale).
L'unique sacerdoce que le Nouveau Testament connaisse est celui du Christ : l'Épître aux Hébreux présente explicitement sa mort comme un sacrifice, dont lui-même a été le grand prêtre, et par lequel il a mis fin, une fois pour toutes, à tous les sacrifices et à tous les sacerdoces, devenant ainsi l'unique médiateur entre Dieu et les hommes (I Timothée, ii, 5-6). Aussi le Nouveau Testament évite-t-il systématiquement le vocabulaire sacerdotal pour qualifier les nombreux ministères qu'il mentionne ; tout au plus l'emploie-t-il, occasionnellement, pour désigner collectivement le peuple chrétien (I Pierre, ii, 5 et 9 ; Apocalypse, i, 6 ; v, 10 ; xx, 6), mais c'est au sens très large d'une vie de justice et sainteté, qui se déploie devant Dieu et devant les hommes et qui n'implique pas que chacun soit prêtre. Si les Pères de l'Église disent cela de chaque chrétien, c'est parce que, dans le Christ et l'Esprit, il a un accès direct à Dieu, mais non au sens de la médiation fondée sur un sacrifice. La catégorie de sacerdoce (ou de médiation) ne permet donc pas d'exprimer adéquatement ce qu'est un prêtre chrétien. Bibliquement et théologiquement, il faut recourir pour cela à la catégorie de ministère, qui a de tout autres fondements que le sacerdoce universel des chrétiens qui délégueraient à quelques-uns ce qui serait le fait de tous.
En réalité, le ministère, fondé à la fois dans l'apostolat et sur un don de l'Esprit (charisme) et reçu dans une ordination (dont la première mention certaine se trouve dans I Timothée, iv, 14 et II Timothée, i, 6), est un service qui a pour fin la construction et la croissance du Corps du Christ. À cet effet, le prêtre reçoit un ministère de la parole (tardivement en Occident ; à la fin du ive s. en Afrique) et un ministère sacerdotal, à savoir la présidence de la célébration des sacrements qui construisent l'Église, surtout quand son ministère s'exerce loin de l'évêque, dans ce qui va devenir la paroisse. D'une façon générale, le ministère du prêtre est un ministère d'animation de l'Église une, sainte, catholique et apostolique qui est rassemblée en un lieu donné et un ministère de lien et de communion avec l'Église entière. Dans une assemblée chrétienne, le prêtre est à la fois un frère comme les autres, mais en même temps, représentant l'Église entière par son ordination, il se situe vis-à-vis des autres chrétiens. Dans ce « vis-à-vis », l'assemblée expérimente symboliquement que l'Église ne se rassemble pas en son propre nom, à la manière d'un club, mais se trouve convoquée comme le peuple que[...]
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Écrit par
- Hervé LEGRAND : professeur honoraire à l'Institut catholique de Paris
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