PRIMATICE, MAÎTRE DE FONTAINEBLEAU (exposition)
Francesco Primaticcio, dit Primatice, figure majeure du maniérisme italien et de la Renaissance française, n'avait jamais fait l'objet d'une exposition monographique en France, et depuis la thèse de Louis Dimier en 1900, non illustrée et à dire vrai dépassée, aucun grand livre ne lui avait été consacré. Cette situation était d'autant plus surprenante que la mémorable exposition L'École de Fontainebleau, organisée au Grand Palais en 1972, avait mis en évidence le rôle central tenu par Primatice dans le renouveau des arts sous François Ier et les derniers Valois. Le rassemblement au Louvre, du 25 septembre 2004 au 3 janvier 2005, grâce à Dominique Cordellier, conservateur en chef au département des arts graphiques, de 175 dessins, 20 peintures, 25 sculptures, 50 estampes et 4 tapisseries, issus des collections du musée et de différents fonds français et étrangers, avec la publication d'un excellent catalogue (Réunion des musées nationaux, Paris, 2004), réunissant les contributions des meilleurs spécialistes, a donc comblé une vraie lacune, en permettant pour la première fois un examen global de l'œuvre du maître.
Né à Bologne en 1504, Primatice débute à Mantoue comme assistant de Giulio Romano, l'un des artistes majeurs issus de l'atelier de Raphaël. Dans la cité des Gonzague, il participe au décor du palais du Té, dont le programme mythologique est particulièrement élaboré. Envoyé en France en 1532, pour présenter à François Ier les modelli réalisés par Giulio Romano pour la Tenture de Scipion l'Africain, il est chargé de superviser leur transcription à l'échelle définitive dans les ateliers de Bruxelles. Il est désormais attaché au service du roi de France. Sur le chantier du château de Fontainebleau, il retrouve un autre artiste italien, Rosso Fiorentino, arrivé en 1530. Associé, pour les stucs et le décor des cabinets nord et sud notamment, à la réalisation de la célèbre galerie François Ier que dirige Rosso, Primatice est plus proprement chargé des appartements royaux (chambres du roi et de la reine). La mort de Rosso, en 1540, le laisse sans rival.
Conçue de manière chronologique, l'exposition du Louvre montrait parfaitement comment cet artiste vite comblé d'honneurs a su mettre au point et développer un style aristocratique, dans lequel l'influence de Michel-Ange apparaît de loin en loin, conjuguée à celle de Giulio Romano. Promoteur d'un modèle d'organisation des grands chantiers décoratifs inspiré de la pratique en usage dans l'atelier de Raphaël, modèle dont Le Brun devait se souvenir un siècle plus tard à Versailles, il fait travailler tous les corps de métier et s'entoure d'autres créateurs, de Nicolò dell'Abate à Germain Pilon, qui, pour être les interprètes de ses idées, n'en conservent pas moins leur personnalité. Plus que Rosso, Primatice est le principal diffuseur du maniérisme italien en France. De ses voyages outre-monts, il rapporte des antiques et des fontes pour le roi, mais aussi une connaissance des dernières évolutions artistiques qui, à travers lui, marqueront la seconde école de Fontainebleau. Enfin, l'importance qu'il accorde à la reproduction de ses propres créations par la gravure contribue évidemment à la diffusion de l'art bellifontain.
Sous François Ier, Primatice poursuit la décoration intérieure du château royal (de la galerie Basse à la galerie d'Ulysse, commencée en 1540 et achevée après sa mort en 1570) ; il intervient aussi dans les jardins et réalise également les dessins de costumes pour des fêtes et mascarades dont le roi et les grands seigneurs sont les acteurs. C'est là, autant que dans les grands décors, qu'il donne forme à l'idée de la vie de cour comme « une mythologie en acte », selon l'expression d'André Chastel[...]
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Écrit par
- Robert DUPIN : auteur
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