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UTILITÉ PRINCIPE D'

Utilitarisme de l'acte contre utilitarisme de la règle : une impasse typologique

Une classification arbitraire consiste à opposer deux types d'utilitarisme : un utilitarisme « de l'acte » et un utilitarisme « de la règle », une perspective dans laquelle n'entre pourtant aucun des grands penseurs de cette doctrine. Selon l'utilitarisme de l'acte, il faudrait calculer avant chaque action combien de bonheur et combien de malheur il en résulte pour l'humanité dans son ensemble. Ce qui est évidemment impossible en raison du temps et de l'information nécessaires à de tels calculs.

Ce que soutiennent les utilitaristes n'est pas que chaque action doit être jugée individuellement en fonction de ses conséquences particulières mais qu'elle doit l'être selon les conséquences qu'elle tend à produire. Bentham le dit très clairement : « Une action est dite conforme au principe d'utilité [...] lorsque sa tendance à augmenter le bonheur de la communauté est plus grande que sa tendance à le diminuer » (An Introduction to The Principles of Morals and Legislation).

La raison pour laquelle le principe d'utilité est formulé de la sorte est très simple. L'expérience de l'humanité montre que certaines actions – le meurtre par exemple – produisent du malheur dans la vaste majorité des cas (le meurtre tend donc à produire du malheur). Face aux actes de ce genre, le pouvoir judiciaire n'a que deux possibilités. La première consiste à examiner une par une chaque situation qui se présente et autoriser des meurtres occasionnels lorsque le calcul préalable des conséquences montre qu'ils augmentent le bonheur général – ce qui, sur le plan pratique, est matériellement impossible ! La seconde solution est d'édicter des règles générales.

Il ne faut toutefois pas tomber dans l'excès contraire, celui de croire qu'il existe un « utilitarisme de la règle », selon lequel les règles morales (qui, au demeurant, sont indispensables) ne comporteraient jamais d'exception. Même lorsque, dans un domaine donné, la règle la plus utile pour la société a été trouvée (le « respect des contrats », par exemple), son application stricte peut, dans certains cas, produire des conséquences malheureuses. Que faire alors ? Lorsque les personnes lésées sont peu nombreuses et que l'observance stricte de la règle est d'une grande utilité générale, il serait absurde de prôner des exceptions : « Il suffit, écrit Hume, d'accorder une compensation pour tous les maux et désagréments qui découlent de situations particulières » (Enquête sur les principes de la morale). Lorsque les désagréments sont beaucoup plus importants que le bienfait qui résulte de l'application stricte de la règle, cela signifie que celle-ci est mauvaise ou qu'on se trouve dans des circonstances où d'autres règles sont applicables. Comme le dit Hume : « Même dans des cas d'urgence moins pressante, l'autorité publique ouvre les greniers sans le consentement des propriétaires... Quelqu'un s'opposerait-il, dans des circonstances exceptionnelles, à transgresser la propriété privée des individus et à sacrifier, afin d'assurer l'intérêt public, une distinction qui n'est faite que pour promouvoir cet intérêt ? »

Toutes ces discussions et interprétations divergentes montrent que l'application du principe d'utilité – critère utilitariste du bonheur de la communauté – est loin d'être simple, contrairement à ce qu'on pourrait croire au premier abord.

— Francisco VERGARA

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Écrit par

  • : président de l'Association pour la diffusion de l'économie politique

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