PRINCIPES D'ÉCONOMIE POLITIQUE, Alfred Marshall Fiche de lecture
Ouvrage de référence du marginalisme anglais (Stanley Jevons, Francis Edgeworth), source d'inspiration dominante de l'orthodoxie cambridgienne jusqu'au regain d'intérêt pour la théorie de l'équilibre général sous l'impulsion de John Hicks (Valeur et capital, 1939), les Principes d'économie politique (Principles of Economics) d'Alfred Marshall (1842-1924) ont façonné la théorie néo-classique de la valeur. L'ouvrage peut en effet s'interpréter comme une tentative de reconstruction de la théorie classique avec les outils du marginalisme. Dès sa parution, il connaît un très grand succès en même temps qu'il concentre sur lui les critiques, tant et si bien qu'il fait l'objet de huit éditions entre 1890 et 1926.
Une théorie de la valeur en équilibre partiel
Les livres I et II sont une introduction à l'objet et aux méthodes de l'économie. L'économie s'intéresse aux désirs d'obtenir des richesses et aux efforts nécessaires pour les obtenir, en tant qu'ils peuvent faire l'objet d'une mesure monétaire. Son sujet d'étude est donc un individu type dont les comportements peuvent être généralisés. Plutôt que de grandes constructions déductives, le théoricien construit des raisonnements partiels, sous l'hypothèse ceteris paribus („toutes choses égales par ailleurs“), qu'il s'efforce ensuite d'assembler en une représentation d'ensemble du système économique.
Dans le livre III, Marshall introduit une loi générale de la demande (inverse), ceteris paribus, qui exprime une relation décroissante entre la quantité d'un bien fournie au marché et le prix auquel elle peut être écoulée. Il la met en œuvre dans deux concepts clés : l'élasticité et le surplus. L'élasticité est une mesure de la sensibilité d'une variable à la variation d'une autre variable. Par exemple, l'élasticité prix de la demande d'un bien est le rapport entre le taux de variation de la demande de ce bien et le taux de variation de son prix. Quant au surplus du et des consommateurs, il est une mesure monétaire de la différence entre ce que l'individu ou le groupe aurait pu payer pour se procurer une certaine quantité de bien et ce qu'il paie effectivement.
Le livre IV, sans doute l'un des plus originaux des Principes, présente les facteurs de la production. Aux facteurs traditionnels que sont la terre, le travail et le capital, Marshall ajoute les connaissances et l'organisation de ces connaissances à tous les niveaux de la vie économique : „l'organisation aide la science ; elle a plusieurs formes, à savoir l'organisation d'une entreprise considérée isolément, l'organisation des diverses entreprises dans la même industrie, l'organisation des diverses industries à l'égard les unes des autres, l'organisation de l'État assurant la sécurité à toutes et venant en aide à beaucoup“. À cette occasion, Marshall introduit des remarques sur les externalités et les économies d'échelle. Une externalité désigne l'influence d'une activité de production sur une autre ; elle peut être positive ou négative selon qu'elle augmente ou diminue la productivité de l'autre producteur. Une activité présente des économies d'échelle lorsque l'augmentation de sa taille permet d'augmenter dans une proportion plus grande (respectivement moins grande) sa production (respectivement ses coûts). Ces concepts sont pleinement utilisés au livre V, où Marshall expose sa théorie de la valeur en relation avec une périodisation des phénomènes économiques.
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Écrit par
- Jean-Sébastien LENFANT : maître de conférences en sciences économiques à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
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