PRINCIPLES OF SCIENTIFIC MANAGEMENT, Frederick Winslow Taylor Fiche de lecture
Mise en œuvre de l'organisation scientifique du travail : succès et limites
Par rapport à Shop Management (1903), ce nouvel ouvrage souligne une autre source de la faible productivité : les mauvaises méthodes de travail des ouvriers. Avant d'être un système de salaires, le scientific management consiste surtout en un changement des méthodes de travail, et préconise le remplacement des méthodes empiriques des ouvriers par des méthodes scientifiques élaborées par les ingénieurs. „Enlever le contrôle de l'atelier d'usinage des mains des ouvriers pour le placer entièrement dans celles de l'encadrement, c'est-à-dire substituer le contrôle scientifique à l'empirisme.“ La méthode Taylor tend alors à une extrême parcellisation du travail ; elle vise une individualisation des salaires et procède d'une conception globale des rapports de production. Dans l'esprit de Taylor, les ingénieurs, qui doivent prendre le contrôle de l'activité ouvrière, doivent aussi prendre leur distance avec le patronat traditionnel. Ses méthodes nécessitent en effet une réorganisation profonde de l'entreprise, un effort d'équipement en nouvelles machines. Cela implique de rompre avec l'organisation hiérarchique traditionnelle, imitée du modèle militaire et peu apte à répondre à la variété des problèmes rencontrés dans les établissements industriels complexes. Cette réorganisation ne peut être immédiate et demande de gros investissements.
Ces contraintes coûteuses ont entraîné une application assez contrastée des méthodes de Taylor. Aux États-Unis, jusqu'à la Première Guerre mondiale, et en dépit de réalisations spectaculaires dans l'industrie automobile, moins d'une centaine d'usines adoptèrent ses méthodes. Plusieurs grèves, dès 1911, s'opposeront à son application. C'est avec la forte concurrence et la recherche d'efficacité des années 1920 que ses doctrines trouvèrent un point d'application et gagnèrent alors le secteur des bureaux, la banque, l'assurance, etc.
En France, on retient surtout des méthodes de Taylor le chronométrage du travail qui n'est qu'un aspect de son schéma général. En 1912, cette expérience mal préparée est, chez Renault, à l'origine d'une grève retentissante. Les méthodes progressent toutefois pendant la guerre dans les usines d'armement pour répondre à l'utilisation d'une main-d'œuvre médiocrement qualifiée. C'est dans les années 1930 que le mouvement s'étend dans l'automobile et les ateliers des chemins de fer. Jusqu'aux années 1960, les méthodes de Taylor, intégrées au système Ford en associant les gains de productivité à la croissance des salaires ouvriers, connaîtront un succès considérable. Au tournant des années 1970, la remise en question des cadences et l'éclatement de la chaîne préconisé par le „Toyotisme“ amorceront le déclin de l'organisation taylorienne du travail.
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Écrit par
- Francis DEMIER : professeur des Universités, université de Paris-X
Classification
Médias