PRIX LASKER 2022
Article modifié le
Les prix 2022 de la fondation Albert-et-Mary-Lasker – plus communément appelés « prix Lasker » et tenus pour être les équivalents américains du prix Nobel de physiologie ou médecine – ont été décernés le 28 septembre de cette même année. Ils distinguent cinq chercheurs : en recherche médicale fondamentale, Richard Hynes, Erkki Ruoslahti et Timothy Springer pour leurs travaux sur les intégrines, molécules assurant les contacts fonctionnels entre cellules ; en recherche clinique, Yuk Ming Dennis Lo pour la mise au point d’un test prénatal non invasif du syndrome de Down ; en santé publique, Lauren Gardner pour la mise au point du Covid-Dashboard, un outil de suivi en temps réel de la pandémie.
Le prix Albert-Lasker pour la recherche médicale fondamentale
Le prix Albert-Lasker pour la recherche fondamentale a été attribué à Richard Hynes, Erkki Ruoslahti et Timothy Springer pour leurs travaux pionniers sur les intégrines. L’enjeu des travaux de Hynes et de Ruoslahti, qui travaillent indépendamment, était à l’origine de comprendre comment les cellules restent harmonieusement associées les unes avec les autres dans un organe, faute de quoi ce dernier se désintégrerait. Timothy Springer, quant à lui, se donnait pour objectif de comprendre comment les cellules immunitaires interagissent entre elles de manière efficace dans la défense de l’organisme. Deux domaines de recherche a priori éloignés l’un de l’autre.
Hynes et Ruoslahti ont d’abord étudié les modifications de la surface cellulaire qui rendaient les cellules cancéreuses faiblement adhérentes entre elles et leur permettaient de s’échapper facilement. Dans les années 1970, les laboratoires respectifs des deux chercheurs identifient une protéine de surface abondante dans la matrice extracellulaire des cellules normales et absente des cellules tumorales. Ils démontrent que cette protéine, la fibronectine, est nécessaire à l’attachement des cellules. Au début des années 1980, Ruoslahti isole une seconde molécule d’attachement, la vitronectine. De son côté, Hynes montre que l’organisation et les déplacements du réseau de fibronectine de l’extérieur de la cellule sont une sorte de copie du réseau d’actine (un composant essentiel du cytosquelette) à l’intérieur de la cellule, imposant l’idée de l’existence d’un lien entre les deux. Au même moment, Springer démontre qu’une molécule transmembranaire, LFA-1, permet l’attachement efficace des lymphocytes T sur leurs cibles. De nombreuses autres molécules à fonction d’interaction semblables sont ensuite identifiées : toutes contribuent aux contacts fonctionnels entre cellules du système immunitaire. Les analyses moléculaires montrent qu’elles présentent de fortes parentés de structure et, au début des années 1990, il est clairement mis en évidence qu’elles appartiennent à une grande famille de molécules, celle des intégrines.
Les intégrines sont ainsi des protéines transmembranaires dont la partie cytoplasmique interagit avec l’actine et les systèmes de signalisation intracellulaire, tandis que la partie extracellulaire interagit avec un récepteur de la matrice extracellulaire comme la fibronectine dans le cas le plus général, et d’autres types de récepteurs transmembranaires sur une cellule cible. Elles sont donc le lien entre réseaux extracellulaire et intracellulaire. Les intégrines sont constituées de deux chaînes, alpha et bêta. Chez l’homme, il existe 18 chaînes alpha et 8 chaînes bêta différentes, source de multiples associations alpha-bêta. Cela explique pourquoi les intégrines sont impliquées dans des fonctions aussi différentes que l’organogenèse, la coagulation du sang, l’adhérence des cellules entre elles, le fonctionnement du système immunitaire… La découverte de ces molécules a permis de comprendre l’origine de certains défauts génétiques affectant par exemple la possibilité[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
Classification
Médias