- 1. Qu’est-ce qu’un microscope électronique ?
- 2. Une méthodologie permettant l’observation de biomolécules par microscopie électronique
- 3. Utilisation de la microscopie électronique en biologie structurale
- 4. L’invention d’une méthode de traitement d’image révolutionnaire
- 5. La révolution de la « haute résolution » en cryomicroscopie électronique
- 6. Les trois scientifiques récompensés
PRIX NOBEL DE CHIMIE 2017
Une méthodologie permettant l’observation de biomolécules par microscopie électronique
Jusque dans les années 1950, les microscopes électroniques à transmission ont surtout été utilisés en physique et en chimie des matériaux. De nombreux verrous technologiques empêchaient d’y introduire des biomolécules dans leur état hydraté (en solution). Notamment, le vide – nécessairement maintenu à l’intérieur de la colonne du microscope – provoque l'évaporation de l’eau, élément nécessaire au maintien des biomolécules en solution. Des méthodes employant des atomes lourds (dérivés d’uranyle le plus souvent) avaient toutefois été mises au point à partir des années 1950. Cependant, ces techniques de coloration négative présentent de nombreux défauts qui empêchent l’observation des biomolécules à haute résolution (résolution généralement limitée à 1,5 nm). Un des défauts majeurs de cette méthodologie est que les biomolécules sont complètement déshydratées, et donc dénaturées, avant d’être introduites dans le microscope électronique.
Jacques Dubochet est incontestablement le père fondateur de la cryomicroscopie électronique (cryoME). L’idée est de congeler les échantillons biologiques pour pouvoir les observer dans un microscope électronique. Cependant, pour cela, il est nécessaire d’obtenir un échantillon suffisamment fin (quelques centaines de micromètres) pour ne pas être complètement opaque aux électrons (les molécules d’eau interagissent avec les électrons). De plus, il faut éviter la formation de glace cristalline qui dénature les échantillons et diffracte le faisceau des électrons, perturbant la formation de l’image. Le travail de Jacques Dubochet au Laboratoire européen de biologie moléculaire (European Molecular Biology Laboratory ou EMBL) à Heidelberg puis à l’université de Lausanne a permis de trouver les conditions qui permettent d’obtenir une fine couche de glace amorphe (et non cristalline) à la surface d’une petite grille de cuivre d’un demi-centimètre de diamètre recouverte d’un fin film de carbone et de pouvoir l’observer dans un microscope électronique. Dans cette fine couche de glace vitreuse, les biomolécules – mais aussi les molécules d’eau – sont figées dans la conformation qu’elles adoptent en solution. Jacques Dubochet et son équipe inventent pour cela une technique de plonge à grande vitesse des échantillons dans l’éthane liquide. Une fois congelé, l’échantillon est transféré dans l’azote liquide et introduit dans un microscope électronique toujours maintenu à une température de – 180 0C.
Ainsi, ce prix Nobel de chimie récompense la mise au point d’une méthodologie qui, à partir des années 1970-1980, permet de visualiser des biomolécules (ADN, protéines, sucres…) dans un microscope électronique tout en préservant l’architecture moléculaire qu’elles adoptent en solution.
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Écrit par
- Rémi FRONZES : directeur de recherche au CNRS
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Médias