PRIX NOBEL DE CHIMIE 2022
De la chimie click à la chimie bio-orthogonale
Les recherches de Carolyn Bertozzi menées à partir de 1997 ont pour objectif la synthèse chimique d'outils moléculaires pour visualiser par imagerie les sucres à la surface des cellules, appelés glycanes, et leur impact sur des pathologies. Le cahier des charges inclut le respect de l’intégrité des cellules ou des organismes étudiés. Ses premiers travaux utilisent des réactions peu efficaces dans le contexte cellulaire. La réaction de chimie click entre un alcyne et un azoture catalysée par le cuivre semble alors offrir une possibilité prometteuse, mais le cuivre peut être toxique pour les cellules. Elle développe alors une version sans cuivre, en améliorant la réactivité de l’alcyne de la réaction initiale de Huisgen. Elle utilise pour cela des alcynes cycliques, créant ainsi une tension dans les liaisons chimiques propices à une réaction plus rapide. Cette réaction est devenue le prototype de la chimie bio-orthogonale, concept introduit en 2003 par Carolyn Bertozzi pour désigner les réactions chimiques qui peuvent se produire rapidement et sélectivement à l'intérieur des systèmes vivants entre des fonctions chimiques naturellement absentes des cellules, et sans interférer (ou presque) avec la chimie de la cellule. Ces prérequis constituent un défi de taille pour le chimiste organicien qui a pour habitude de réaliser des réactions dans des conditions très éloignées de celles présentes à l’intérieur d’une cellule en termes de solvant, de pH, de température, de concentration des réactifs et surtout de complexité moléculaire. En effet, une cellule renferme une multitude de molécules aux propriétés et réactivités variées. Et c’est donc bien ce défi qu’a surmonté Carolyn Bertozzi en réalisant de la chimie entre des molécules exogènes (introduites par le chimiste) au sein de systèmes vivants.
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Écrit par
- Christophe BIOT : professeur des Universités, directeur de l’équipe chémoglycobiologie à UMR 8576, université de Lille - CNRS
- Dominique GUIANVARC’H : professeure des Universités à l'Institut de chimie moléculaire et des matériaux d'Orsay, université Paris-Saclay
- Boris VAUZEILLES : directeur de recherche CNRS à l'Institut des substances naturelles, Gif-sur-Yvette
Classification
Média