PRIX NOBEL DE PHYSIQUE 2019
Le prix Nobel de physique 2019 est décerné pour « des contributions à notre compréhension de l’évolution de l’Univers et de la place de la Terre dans le cosmos ». Il est attribué pour moitié à James Peebles (université de Princeton, États-Unis), pour ses travaux théoriques de cosmologie et, pour l’autre moitié, conjointement à Michel Mayor (université de Genève) et Didier Queloz (université de Genève ; université de Cambridge, Royaume-Uni) pour la découverte de la première exoplanète. L’Académie royale de Suède, attribuant le prix, souligne que ces lauréats, dans deux domaines différents, ont « contribué à répondre à des questions fondamentales concernant notre existence ». Il est remarquable que soit ainsi affirmé qu’outre la science elle-même, les résultats de ces travaux concernent tous les hommes et leurs cultures.
L’Univers sculpté par les galaxies
La moitié du prix Nobel de physique 2019 vient récompenser la carrière de James Peebles, cosmologiste canado-américain qui est l’architecte de la représentation que nous nous faisons désormais de l’Univers.
Né le 25 avril 1935 à Saint-Boniface (Manitoba) au Canada, Phillip James Edwin Peebles fait ses études dans son pays d’origine jusqu’à la préparation de son doctorat qu’il effectue à l’université de Princeton (États-Unis) sous la direction de Robert Dicke (1916-1997). Sa thèse, qu’il obtiendra en 1962, porte sur les aspects théoriques et observationnels d’une éventuelle variation des lois de l’électromagnétisme au cours de l’histoire de l’Univers. À cette époque, la cosmologie, c’est-à-dire l’étude de l’Univers dans son ensemble, est une discipline très confidentielle. Étudier l’Univers en tant que système physique est alors une activité hasardeuse, voire peu scientifique, car les données dont disposent les astronomes sont encore bien maigres. Bien sûr, l’expansion de l’Univers a été découverte à la toute fin des années 1920 par Edwin Hubble (1889-1953), mais c’est à peu près tout ce que l’on sait...
Dès la fin de son doctorat, James Peebles et Robert Dicke comprennent que, si l’Univers est en expansion, cela signifie qu’il était par le passé non seulement plus dense, mais aussi plus chaud et donc très lumineux. Cet éclat a ensuite été dilué et refroidi par l’expansion mais doit toujours exister sous la forme d’un rayonnement thermique à très basse température, c’est-à-dire détectable dans le domaine des ondes radio. Robert Dicke, à la fois spécialiste de relativité générale et précurseur dans la construction des radars, possède toutes les compétences pour s’attaquer à la détection de ce rayonnement. Avec James Peebles, David Wilkinson (1935-2002) et Peter Roll, il se lance dans la construction d’une antenne dédiée. La logique aurait voulu qu’ils mènent à bien leur projet mais, en 1964, Arno Penzias et Robert Wilson, radioastronomes américains, découvrent par hasard ce rayonnement – désormais appelé fond diffus cosmologique – dont ils ignoraient la possible existence. Les deux hommes recevront le prix Nobel de physique en 1978 pour cette découverte fortuite, un dénouement logique mais cruel pour James Peebles et son équipe. Mais cela n’empêchera pas ce dernier de se consacrer pleinement à la cosmologie pendant plus d’un demi-siècle.
James Peebles a accompagné tous les développements de cette discipline dès que celle-ci s’est imposée comme un domaine scientifique à part entière. En particulier, il a défriché la formation des grandes structures, c’est-à-dire la façon dont l’Univers dense, jeune, chaud mais aussi très homogène permet, via l’action déstabilisatrice de la force de gravitation, la formation de régions un peu plus denses qui s’avéreront quelque centaines de millions d’années plus tard constituer les embryons des futures [...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre LÉNA : professeur émérite de l'université Paris-VII-Denis-Diderot, membre de l'Académie des sciences
- Alain RIAZUELO : chargé de recherche au CNRS, Institut d'astrophysique de Paris
Classification
Médias