PRIX NOBEL DE PHYSIQUE 2019
Des planètes hors du système solaire, une révolution
Les astrophysiciens suisses Michel Mayor et Didier Queloz sont distingués « pour la découverte d’une exoplanète en orbite autour d’une étoile de type solaire », qu’ils avaient annoncée le 6 octobre 1995, à l’occasion d’un congrès scientifique à Florence (Italie). Avec l’un des télescopes de l’Observatoire de Haute-Provence (CNRS), en France, lors d’un programme de recherche de compagnons stellaires, ils avaient alors mis en évidence la présence d’un objet (51 Pegasi b), de masse comparable à celle de la planète Jupiter et parcourant en 4,23 jours (terrestres) son orbite autour de l’étoile 51 Pegasi, distante de 50,5 années-lumière de la Terre et assez semblable au Soleil. Cette observation a été la première réponse apportée à une ancienne et longue quête portant sur l’existence hypothétique de systèmes planétaires autour d’autres étoiles que le Soleil. Toutes les tentatives de mise en évidence de telles exoplanètes avaient jusque-là échoué, et il fallut plus d’une année à l’équipe genevoise pour faire accepter la réalité de sa découverte. En effet, il était surprenant d’observer une exoplanète massive aussi proche de son étoile, et de comprendre le processus de formation et d’évolution qui avait pu la placer sur une telle orbite. L’existence de tels « Jupiter chauds » se révélera ultérieurement assez fréquente. Elle n’était que la première surprise qu’allaient provoquer ces nouveaux mondes.
Cette découverte majeure a ouvert en astrophysique un nouveau champ d’exploration qui se révèle d’une extrême fécondité. Depuis, au sein de notre Galaxie, des milliers de systèmes comprenant une ou plusieurs exoplanètes en orbite autour d’une étoile ont été découverts. L’analyse statistique de ces résultats montre que dans notre Galaxie, donc vraisemblablement dans un très grand nombre d’autres, la majorité des systèmes d’étoiles possède des planètes qui gravitent autour de celles-ci. Parfois appelées « planètes extrasolaires », ces exoplanètes sont d’une extrême diversité quant à leur dimension, leur densité et composition, leur orbite et leur histoire, pour autant que ces différentes caractéristiques puissent déjà être déterminées par les outils d’observation et comprises par les modèles décrivant ces objets. Un immense champ de recherche s’est donc ouvert, offrant en particulier à la question de l’existence de la vie dans l’Univers (exobiologie), hors la Terre, de nouvelles voies d’exploration.
Michel Mayor, né le 12 janvier 1942 à Lausanne, a fait toute sa carrière de professeur à l’Observatoire astronomique de l’université de Genève, qu’il a dirigé de 1998 à 2004. Il est depuis 2002 membre associé étranger de l’Académie des sciences de France. Didier Queloz, né le 23 février 1966, préparait à l’époque de la découverte une thèse de doctorat sous la direction de Michel Mayor, avec lequel il collaborait étroitement. Il est professeur à la fois à l’université de Genève et à celle de Cambridge.
Intéressé, dès les années 1980, avec le Suisse Antoine Duquennoy, par l’analyse des mouvements stellaires, en particulier dans les systèmes multiples (composés d’un petit nombre d'étoiles orbitant les unes autour des autres), Michel Mayor et ses collaborateurs, rejoints par Didier Queloz, ont développé dans ce but des spectrographes, instruments capables de mesurer, grâce à l’effet Doppler-Fizeau et avec une exceptionnelle précision atteignant le mètre par seconde (m/s), la vitesse radiale relative d’une étoile, c’est-à-dire sa vitesse d’approche ou d’éloignement relativement à un observateur terrestre. Une telle précision, véritable défi instrumental et observationnel, permet de détecter l’effet gravitationnel, sur le mouvement de l’étoile, de l’éventuelle[...]
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Écrit par
- Pierre LÉNA : professeur émérite de l'université Paris-VII-Denis-Diderot, membre de l'Académie des sciences
- Alain RIAZUELO : chargé de recherche au CNRS, Institut d'astrophysique de Paris
Classification
Médias