PRIX NOBEL DE PHYSIQUE 2021
Le prix Nobel de physique 2021 a été attribué, d’une part, à Syukuro Manabe et Klaus Hasselmann, deux spécialistes de la modélisation numérique du climat, et, d’autre part, à Giorgio Parisi, un théoricien des systèmes physiques complexes.
Deux experts du climat à l’honneur
En cette période de crise climatique, l’un des grands défis du xxie siècle, le comité Nobel vient de récompenser, le 5 octobre 2021, l’Américano-Japonais Syukuro Manabe et l’Allemand Klaus Hasselmann pour « la modélisation physique du climat de la Terre et pour en avoir quantifié la variabilité et prédit de façon fiable le réchauffement climatique ». Leurs travaux fondateurs ont permis une meilleure compréhension du système complexe du climat de la Terre, le lancement d‘alertes sur le réchauffement climatique anthropique et l’élaboration de scénarios d’évolution future.
Syukuro Manabe, né le 21 septembre 1931 à Shikokuchūō, dans la préfecture d’Ehime (Japon), est un météorologue et climatologue, pionnier du développement des modèles numériques du climat et de leur usage. Il a étudié la physique de 1953 à 1958 au Japon, à l’université de Tōkyō, avant de rejoindre, aux États-Unis, Joseph Smagorinsky (1924-2005), en tant que researchmeteorologist à l’US Weather Bureau. Il est ensuite resté fidèle à cette institution (devenue le Geophysical Fluid Dynamics Laboratory de la NOAA), ainsi qu’à l’université de Princeton – à l’exception toutefois de la période 1997-2002 pendant laquelle il fut, au Japon, directeur d’un important programme de recherche sur le réchauffement global.
Manabe s’est consacré dès les débuts de sa carrière au développement de modèles « réalistes », qui n’ont bien sûr jamais eu pour objectif d’être des copies exactes du monde réel mais, au contraire, de fournir des outils numériques permettant de mieux comprendre le fonctionnement des systèmes environnementaux. Pour progresser, il a ainsi très souvent focalisé son travail sur des enjeux précis, en ignorant volontairement certaines difficultés. L’un des enjeux majeurs des années 1960 était alors de pouvoir relier les modèles consacrés aux calculs radiatifs et les modèles de circulation générale de l’atmosphère. Le travail qu’il a réalisé avec Richard T. Wetherald (1936-2011) en 1967 a permis de franchir cet obstacle, et préparé l’avènement des modèles directement utilisables pour des études climatiques.
Au fil des années suivantes, Manabe et son équipe ont ainsi pu approfondir des sujets nouveaux et participer en première ligne à la fois à l’amélioration des modèles climatiques et à la compréhension des mécanismes sous-jacents. Les quelque 150 articles publiés tout au long de la carrière de Manabe ont traité de thèmes importants – le rôle du cycle de l’eau, les fluctuations de l’intensité du Soleil, la dynamique stratosphérique et celle des régions tropicales, les cycles saisonniers, l’augmentation des gaz à effet de serre… – avec, souvent, une longueur d’avance sur les autres laboratoires.
La mise en place des modèles couplés océan-atmosphère a constitué l’un des exemples forts de ces études pionnières fondées sur des développements techniques tout en permettant des avancées conceptuelles. L’étude des climats du passé peut, par exemple, suggérer la possibilité d’équilibres multiples de la circulation océanique liés à des apports d’eau douce, en particulier aux hautes latitudes, et les modèles climatiques ont été indispensables pour en faire l’analyse.
Klaus Hasselmann, quant à lui, né le 25 octobre 1931 à Hambourg (Allemagne), est océanographe et climatologue. Il a fait ses études universitaires de physique et mathématiques à l’université de Hambourg et préparé sa thèse de doctorat en physique à l’Institut Max-Planck de dynamique des fluides. Il a obtenu son diplôme de[...]
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Écrit par
- Hervé LE TREUT : professeur à Sorbonne université et à l'École polytechnique, membre de l'Académie des sciences
- Laurent LI : directeur de recherche CNRS au Laboratoire de météorologie dynamique, Institut Pierre-Simon-Laplace
- Bernard PIRE : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau
Classification
Médias