NUREMBERG PROCÈS DE
Article modifié le
Le verdict
Ils sont huit, quatre titulaires qui seuls ont droit de vote et quatre suppléants dont le rôle est consultatif. Le juge anglais, Geoffrey Lawrence, préside les débats. Il est assisté par Norman Birkett. Francis Bidell, ancien ministre de la Justice et John Parker, juge à la Cour d'appel fédérale, représentent les États-Unis. L'URSS a commis le major général Iola Nikitchenko et le lieutenant-colonel Alexandre Voltchov, seuls à siéger en uniforme. Le juge français, Henri Donnedieu de Vabres, qui a enseigné le droit pénal à des générations d'étudiants, a pour suppléant Robert Falco – il a déjà représenté la France lors de la négociation de l'accord de Londres établissant le tribunal. Les décisions doivent être prises à la majorité des voix ; en cas d'égalité, celle du président est prépondérante, étant donné toutefois que les jugements et les peines ne seront prononcés que par un vote d'au moins trois membres du tribunal.
Les juges débattent des questions juridiques. Trois des chefs d'accusation, le « complot contre la paix », « le crime contre la paix » et le « crime contre l'humanité » sont reconnus juridiquement pour la première fois. De longs débats ont été consacrés dans les séances d'ouverture à la question de savoir s'ils étaient rétroactifs, allant à l'encontre du principe : nullapoena sine lege (« nulle peine sans loi antérieure au crime »). Donnedieu de Vabres, pendant le délibéré, conteste le premier chef d'accusation qui est le soubassement de tout le procès, l'essence de l'accusation américaine et britannique, le complot contre la paix, au motif que ce concept n'existe pas en droit international. Il fait l'unanimité contre lui. Il s'inclina mais, sa vie durant, continua de défendre cette position.
Le 2 septembre commence l'examen des responsabilités individuelles dans l'ordre de l'acte d'accusation. Göring est reconnu coupable des quatre chefs d'accusation et condamné à la mort par pendaison.
Dix autres accusés sont à leur tour condamnés à mort. Il semblerait que la gravité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité soit le critère décisif. Ainsi, Fritz Sauckel, Julius Streicher, Ernst Kaltenbrunner, Hans Frank, gouverneur de la Pologne, sont tous les quatre condamnés à la peine capitale alors qu'ils ne se voient reconnaître aucune responsabilité dans le déclenchement de la guerre. Rudolf Hess, convaincu d'avoir participé au complot et crimes contre la paix, mais exonéré de toute participation aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité, est condamné à la prison à vie. Autres condamnés à mort : Alfred Jodl, Joachim von Ribbentrop, Alfred Rosenberg, Arthur Seyss-Inquart, Wilhelm Frick, Wilhelm Keitel. Walther Funk est condamné à la prison à vie, Baldur von Schirach et Albert Speer à vingt ans de prison ; Konstantin von Neurath à quinze ans de prison, Karl Dönitz à dix ans de prison. Hjalmar Schacht, Franz von Papen et Hans Fritzsche sont acquittés.
Le 1er octobre, devant une salle comble, le président Lawrence commence la lecture des 300 pages de la partie générale du jugement, relayé par les sept autres juges. La matinée du 2 octobre est consacrée à la lecture par les seuls juges titulaires des responsabilités de chacun. Les trois acquittements causent une énorme surprise. On ne s'attendait pas à cette clémence. L'après-midi, le président prononce les peines. À tour de rôle, chacun des dix-huit condamnés, encadré par deux soldats américains, est introduit devant les juges et se voit signifier sa peine. Le président prend alors la parole une dernière fois pour lire la protestation des Soviétiques contre les acquittements de Schacht, von Papen et Fritzsche et contre le fait que Hess n'ait pas été condamné à mort. La 404[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Annette WIEVIORKA : directrice de recherche émérite au C.N.R.S., U.M.R. identités, relations internationales et civilisations de l'Europe, université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
Classification
Médias
Autres références
-
PROCÈS DE NUREMBERG ET DE TOKYO
- Écrit par Wanda MASTOR
- 232 mots
- 1 média
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, des tribunaux internationaux ad hoc furent chargés de juger les grands criminels de guerre. Pour la première fois, une sanction judiciaire internationale des crimes contre la paix, des crimes de guerre et de la nouvelle catégorie des crimes contre...
-
ALLEMAGNE (Histoire) - Allemagne moderne et contemporaine
- Écrit par Michel EUDE et Alfred GROSSER
- 26 892 mots
- 39 médias
...que fût leur degré de culpabilité. Encore les vaincus auraient-ils pu mesurer la dimension des crimes commis jusqu'en 1945 en suivant le procès intenté à Nuremberg aux chefs et aux organisations nazis. Mais à leurs yeux le tribunal, composé uniquement de vainqueurs, était d'une impartialité douteuse. Et... -
COMITÉS D'ÉTHIQUE BIOMÉDICALE
- Écrit par Christine FAURE
- 4 370 mots
- 3 médias
En outre, des déclarations à caractère plus spécialisé constituent un second cadre de référence pour la communauté internationale.Ces déclarations découlent des principes fondamentaux énoncés par le tribunal de Nuremberg les 19 et 20 août 1947 sur les conditions de l'expérimentation médicale.... -
COUR PÉNALE INTERNATIONALE
- Écrit par Sarah PELLET
- 2 676 mots
- 3 médias
...mondiale relance les discussions et les Alliés affirment leur volonté de juger les responsables. À la fin de la guerre, deux juridictions sont créées : le Tribunal militaire international de Nuremberg, par l'accord de Londres du 8 août 1945, et le Tribunal international pour l'Extrême-Orient, par une... -
CRIME DE GUERRE
- Écrit par Jean DELMAS
- 1 004 mots
- 2 médias
« Atrocités ou délits commis sur des personnes et des biens en violation des lois et usages de la guerre, y compris l'assassinat, les mauvais traitements ou la déportation, pour des travaux forcés ou pour tout autre but, des populations civiles dans les territoires occupés, l'assassinat...
- Afficher les 17 références