PROCÈS (mise en scène K. Lupa)
Entre rêverie et cauchemar
Le metteur en scène, également plasticien et scénographe, situe ce voyage théâtral de près de cinq heures, à la fois passionnant et troublant à bien des titres, aux frontières de la rêverie et du cauchemar. Dans un espace cadré, parfois bordé de lumières rouges comme autant de signaux d’alerte ou de lignes à ne pas franchir, au décor sobre et variable sous la transparence et les lumières, le jeu des comédiens se montre en osmose avec les vidéos projetées sur un écran qui domine la scène, ponctué par des voix et des sonorités évocatrices, qui contribuent à la polyphonie souhaitée. La vingtaine d’interprètes polonais magnifiques et inventifs, dont Andrzej Klak (Franz K.), Marcin Pempus, son double – tous deux en alternance suivant les représentations –, Bozena Baranowska (Madame Grubach) Malgorzata Gorol (Grete Bloch), Piotr Skiba (l’avocat) ou Marta Zieba (Felice Bauer) rendent palpables les relations et les recherches que le maître polonais entretient avec les comédiens qu’il dirige, largement évoquées dans son livre Utopia.Lettres auxacteurs (Actes Sud, 2016). Dans cette réalisation magnifiquement aboutie, Krystian Lupa tient à distance le pessimisme kafkaïen. Il aiguillonne surtout l’esprit du spectateur pour susciter, sans didactisme, une prise de conscience et une vigilance nécessaires, capables de stimuler les possibilités d’espoir et de liberté individuelle dans une démocratie digne de ce nom.
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Écrit par
- Jean CHOLLET : journaliste et critique dramatique
Classification
Média