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PRODUCTEUR DE MUSIQUE

L’histoire des musiques populaires est indissociable des artistes qui les ont faites. Mais elle se rattache aussi étroitement aux entrepreneurs, visionnaires, producteurs, managers, patrons de label et de studio qui ont permis à leurs poulains ou clients de connaître la gloire ou, à défaut, de devenir des perdants magnifiques. Ces succès et ces échecs façonnent l’industrie du disque, principalement depuis le début des années 1920.

Parmi les différents acteurs de l’industrie du disque, le producteur musical est aujourd’hui généralement chargé de superviser les sessions d’enregistrement d’un artiste. Il définit l’identité sonore d’un album au cours de ce processus d’enregistrement, le plus souvent en studio. Dans les années 1920, au début de la commercialisation de la musique enregistrée grâce au format 78-tours, le rôle du producteur musical n’existe pas vraiment. Les compagnies de disques s’appuient essentiellement sur des directeurs artistiques, qui constituent des catalogues d’artistes, ou bien sur des découvreurs de talents (talent scouts) afin de signer et d’enregistrer des artistes. En provenance des grandes villes du Nord, les talent scouts sillonnent notamment le sud des États-Unis, contribuant à faire émerger des genres musicaux comme le blues et la country, deux composantes essentielles du rock and roll des années 1950 et plus largement des musiques populaires du xxe siècle.

Les prémices de la production musicale

Les premiers producteurs de jazz

Si la naissance du rhythm and blues et du rock démocratise le rôle du producteur musical, ce métier émerge dans le milieu du jazz. Au cours des années 1930 et 1940, on voit apparaître les premiers labels de jazz : la production musicale consiste alors avant tout à retranscrire sur un document sonore la séance en studio. Ainsi, avant de produire dans les années 1960 de grandes figures comme Bob Dylan ou Aretha Franklin, John Hammond (1910-1987) révèle dans les années 1930 Billie Holiday, Count Basie ou encore Charlie Christian. À partir de 1939, le label Blue Note et ses cofondateurs, dont Alfred Lion (1908-1987) et Francis Wolff (1908-1971), signent les plus grands noms du jazz. Plus tard, ce label fera évoluer prodigieusement les techniques d’enregistrement, grâce à l’ingénieur du son Rudy Van Gelder qui les rejoint en 1953. Celui-ci apportera une chaleur et un réalisme saisissant aux sessions qu’il supervisera, optimisant le placement des musiciens et des micros pour capter l’enregistrement comme jamais auparavant. En 1964, l’album de John ColtraneA Love Supreme sera l’une de ses plus belles réussites. Suivant ses avancées sonores, des marques de jazz comme Prestige et Impulse donneront également ses lettres de noblesse à la production jazz.

Milt Gabler

Le New-Yorkais Milt Gabler (1911-2001) est un des premiers bâtisseurs de l’industrie du disque et probablement le premier producteur musical. Employé à la boutique de disques de son père, ce féru de musique se passionne pour les premiers enregistrements de jazz et de blues, gravés sur des 78-tours, à partir desquels il publie des compilations. Dès 1937, il enregistre des ensembles de jazz et produit de nombreuses sessions, donnant aux musiciens des indications précises sur le son qu’il souhaite obtenir et mettant en place des méthodes de travail inédites souvent imitées par la suite. En 1939, il publie « Strange Fruit » interprété par Billie Holiday sur Commodore Records, firme indépendante qu’il vient de lancer. Véritable acte de naissance de la chanson contestataire, ce titre deviendra l’un des plus grands standards du xxe siècle.

Son statut de producteur assuré, Milt Gabler se consacre à des réalisations artistiques pour de grandes marques de disques comme Decca. Il enregistre notamment en 1942 le titre « Flying Home» de Lionel Hampton sur lequel le solo du saxophoniste ténor Illinois[...]

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Ahmet Ertegun, Jerry Wexler et Big Joe Turner

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