PRODUCTEURS DU SUD-OUEST, Amérique du Nord

L'Anasazien (± 2000 B.P.-Conquête espagnole)

Le terme Anasazi fut emprunté en 1936 à la langue des Navajo, peuple arrivé tardivement dans la région, par l'archéologue américain Alfred Kidder pour désigner les habitants préhistoriques des plateaux situés à la croisée de l'Utah, du Colorado, de l'Arizona et du Nouveau-Mexique. Kidder croyait que ce mot signifiait « le peuple d'autrefois » alors que son sens est « les ancêtres ennemis ».

L'Anasazien, qui présente un faciès occidental et un faciès oriental, est divisé en six phases désignées selon une terminologie peu cohérente, en partie héritée du xix^e siècle : le Basketmaker II (2000-1500 B.P.), le Basketmaker III (1500-1200 B.P.), le Pueblo I (±1 250-1050 B.P.), le Pueblo II (1050-850 B.P.), le Pueblo III (850-450 B.P.) et le Pueblo IV (450 B.P. jusqu'à la fin du xvi^e siècle). Le Basketmaker I, préagricole, correspond à l'Archaïque et ne fait donc pas partie de l'Anasazien.

Au cours de la première phase, la culture du maïs et de la courge se développe parallèlement à un mode de subsistance reposant sur la chasse et la collecte des plantes, des graines et des fruits. La poterie est encore exceptionnelle et les vestiges mobiliers, les mêmes qu'à l'Archaïque, comprennent, outre les instruments de mouture (meules ou metates et mains de meules), de nombreux objets en vannerie et autres matières organiques aux décorations variées : récipients divers, vêtements, sandales, couvertures, filets, pièges. Les villages, encore rares et isolés, sont constitués d'habitations circulaires de surface à l'est, mais en fosses profondes à l'ouest. Les différentes niches écologiques expliquent les variantes locales de l'Anasazien. À partir du Basketmaker III, l'installation, dans des terrains naturellement bien irrigués, de villages comptant parfois plus de cinquante maisons témoigne de l'importance accrue de l'agriculture. Les metates creux remplacent les meules plates. Le haricot commence d'être cultivé, le dindon est domestiqué et l'arc remplace le propulseur utilisé depuis le Paléoindien. La poterie, de couleur grise, parfois décorée de quelques motifs noirs, se généralise.

Les phases Pueblo correspondent à l'apogée de l'Anasazien et, deux siècles avant l'arrivée des Espagnols, à son déclin relatif, dont témoignent l'abandon de nombreux sites et un nouveau développement de la chasse et de la collecte. Au Pueblo I, la population est particulièrement dense sur les plateaux et dans les grandes vallées alluviales. Quelques agglomérations comptent plus de deux cents bâtiments, de plus en plus souvent construits en surface et parfois en maçonnerie. Les maisons communautaires et rituelles, les kivas, deviennent de grandes constructions spécialisées, semi-souterraines, dont la charpente est supportée par des pilastres de pierre ou de terre. Alors que la vannerie perd de son importance, la poterie présente une plus grande diversité de formes et une meilleure finition des décors, peints sur un engobe blanc. Le coton, couramment cultivé, est tissé au métier. La pratique des déformations crâniennes infligées dès l'enfance, fit croire aux premiers préhistoriens qu'une nouvelle population dolicocéphale était apparue à cette période.

Les phases II et III du Pueblo correspondent à l'extension maximale de la population et de l'influence anasaziennes, sans doute favorisée par une période de plus grande pluviosité. Les travaux d'irrigation et de terrassement prennent de l'ampleur. On les retrouve jusque sur le plateau du Colorado aujourd'hui désertique. La population tend à se concentrer dans des agglomérations de plus en plus grandes, qui reflètent une planification d'ensemble, comme Pueblo Bonito dans le canyon du Chaco au Nouveau-Mexique. Les habitations comprennent[...]