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PRODUCTION SYNTAXIQUE

Selon une description très générale, tout énoncé décrit un état de fait à propos de quelque chose (« ça brûle », « je pense »). Un énoncé est donc précédé par un message, possiblement non linguistique, qu'un locuteur souhaite exprimer. La syntaxe est un dispositif mental permettant de traduire ce message en mots, les combinant dans des séquences adéquates et leur donnant les formes appropriées au contexte. Les séquences sont régies par des contraintes portant, par exemple, sur l'ordre d'apparition des mots. Les formes sont régies, entre autres, par des règles d'accord ou de déclinaison. La régularité des productions des locuteurs d'une langue permet de décrire les règles syntaxiques qui gouvernent la construction des énoncés.

Les psycholinguistes s’intéressent particulièrement aux mécanismes mentaux qui permettent aux individus de produire des énoncés et, donc, aux mécanismes syntaxiques. Pour cela, ils disposent de trois grandes catégories de données : la production de lapsus en situation naturelle, la pathologie de la syntaxe observée chez des patients cérébro-lésés et les données issues d’expérimentations sur la production syntaxique.

La production de lapsus en situation naturelle

La production verbale est habituellement à ce point fluide et rapide qu’il n’est pas possible, à la simple audition d’un locuteur, de comprendre quels sont les mécanismes à l’œuvre dans sa production verbale. Mais des observations intéressantes peuvent être extraites des situations où les locuteurs éprouvent des difficultés et produisent des erreurs particulières comme les lapsus. Il existe de nombreux types de lapsus, par exemple ceux concernant les phonèmes (« le chour est faud ») ou les mots (« j'ai mis la route en four », au lieu de « le four en route »). Les lapsus préservent quasi systématiquement la structure et les propriétés syntaxiques de l'énoncé. Ainsi, les noms sont confondus avec des noms (exemple précédent) et les verbes avec les verbes. Parmi les lapsus impliquant des mots entiers, le croisement entre noms et verbes est très peu fréquent. Plus intéressant encore, les règles telles que l'accord grammatical peuvent être préservées alors même qu'il y a une erreur sur les mots. Dans l'exemple précédent, l'article défini (« le » et « la ») est correctement accordé avec le mot effectivement – et incorrectement – produit. Comme dernier exemple, le lapsus « y a ceux qui se mettent sur les femmes de leurs genoux » a peu de sens mais est syntaxiquement correct.

Ces observations suggèrent que la production syntaxique dicte certaines de ses contraintes indépendamment du contenu du message qui est à l'origine de l'énoncé, parfois au prix du sens exprimé. La construction du message et son encodage linguistique apparaissent donc comme des opérations mentales relativement distinctes.

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Écrit par

  • : docteur en sciences cognitives, directeur de recherche au CNRS

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