PROHIBITION DE LA FORCE ARMÉE (DROIT INTERNATIONAL)
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L’action menée sous l’égide du Conseil de sécurité
Le chapitre VII de la Charte des Nations unies donne compétence au Conseil de sécurité pour mener « au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu’il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationales » (art. 42). Ces mesures « sont prises par tous les Membres des Nations unies ou certains d’entre eux, selon l’appréciation du Conseil » (art. 48), ce dernier pouvant « utilise[r], s’il y a lieu, les accords ou organismes régionaux pour l’application des mesures coercitives prises sous son autorité » (chapitre VIII, art. 53). En pratique, le Conseil a plusieurs fois fait usage de cette possibilité, que ce soit lors de la guerre du Golfe (1991), des crises en Somalie (1992) ou en Haïti (1994), ou encore des conflits en Bosnie-Herzégovine (1992), au Rwanda (1994), en Libye (2011) et en Côte d’Ivoire (2011).
Si cette possibilité n’a jamais été mise en cause, trois types de débats sont apparus dans la pratique.
D’abord, on s’est demandé si les organisations régionales ne pourraient pas, exceptionnellement, agir sans l’autorisation du Conseil. Cette possibilité ne fait pas de doute lorsqu’une organisation intervient avec le consentement de l’État sur le territoire duquel a lieu l’intervention (comme c’est fréquemment le cas des opérations régionales de maintien de la paix, à l’instar de celle de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest [CEDEAO] au Liberia et en Sierra Leone dans les années 1990, ou en Gambie en 2017). Dans ce cas, on se retrouve dans l’hypothèse du consentement de l’État évoquée plus haut. De même, il est admis qu’une organisation interétatique puisse se fonder, conformément à son acte constitutif, sur un droit de légitime défense collective visant à mettre fin à une agression armée dont serait victime l’un de ses membres (comme l’a fait l’OTAN pour justifier son intervention en Afghanistan en soutien des États-Unis après les attaques du 11 septembre 2001). Cette hypothèse de la légitime défense sera plus précisément examinée plus bas. En revanche, s’il s’agit d’intervenir pour renverser un gouvernement à l’intérieur d’un État, l’article 53 de la Charte s’y oppose clairement puisqu’il précise qu’« aucune action coercitive ne sera entreprise en vertu d’accords régionaux ou par des organismes régionaux sans l’autorisation du Conseil de sécurité ». En pratique, et au-delà des deux situations qui viennent d’être mentionnées, on ne connaît aucun précédent dans lequel un organisme régional aurait prétendu pouvoir agir en ce sens sans autorisation du Conseil.
En revanche, qu’il s’agisse de l’intervention de l’OTAN en Yougoslavie en 1999 ou de la coalition menée par les États-Unis en Irak en 2003, certains États ont semblé « présumer »une autorisation du Conseil de sécurité à partir de résolutions qui n’en contenaient aucune. Ces arguments ont été rejetés par la majorité des États, non seulement en Afrique, en Asie et en Amérique latine (traditionnellement soucieux de défendre un principe de non-intervention qui protège leur souveraineté), mais aussi en Europe (y compris occidentale, en particulier à l’occasion de la guerre menée contre l’Irak, à laquelle la France avait tenté de s’opposer). Des critiques ont également été formulées par la doctrine. Dans une résolution de 2011 spécifiquement consacrée aux compétences du Conseil de sécurité dans le domaine du recours à la force, l’Institut de droit international indique : « Lorsqu’il autorise l’emploi de la force, le Conseil de sécurité précisera les objectifs, le champ d’application et les modalités de contrôle de toute mesure prise en application de cette autorisation » (« Problèmes actuels du recours à la force en droit international – L’autorisation[...]
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Écrit par
- Olivier CORTEN : professeur de droit international public, université libre de Bruxelles, Belgique
Classification
Médias