PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE
On désigne sous le nom de propriété industrielle l'ensemble des droits accordés aux industriels et commerçants sur divers éléments de leur patrimoine commercial. La propriété industrielle présente ce caractère spécifique d'avoir pour objet un bien incorporel, à la différence de la propriété qui s'exerce sur des biens corporels perceptibles par les sens. Elle entretient à ce titre des relations étroites avec les autres propriétés incorporelles, littéraire et artistique.
Dans son acception la plus large, la notion englobe notamment les appellations d'origine et les indications de provenance, les brevets d'invention, les dessins et les modèles, les marques de fabrique ou de commerce et les noms commerciaux. Elle comprend aussi le droit de se servir des récompenses industrielles et commerciales, et, dans une acception plus large encore, la répression de la concurrence déloyale.
La définition qu'en donne la convention de Londres de 1934 permet de l'appliquer non seulement à l' industrie et au commerce proprement dits, mais également au domaine des industries agricoles et extractives et à tous produits fabriqués ou naturels tels que les vins, les grains, les feuilles de tabac, les fruits, les bestiaux, les minéraux, les eaux minérales, les fleurs, les farines, etc. La crainte que l'inventeur d'un remède nécessaire à la santé publique ne spécule sur cette nécessité même et n'élève ses prix sans limite à l'abri d'un monopole a longtemps conduit à écarter les médicaments de l'emprise de la propriété industrielle. Cette prévention absolue a laissé place à un régime spécifique de la propriété intellectuelle des médicaments en 1959, puis à une assimilation progressive au droit commun à partir de 1968.
La notion même de propriété industrielle présente des caractères originaux que la sémantique ne fait pas apparaître. La qualification juridique de propriété industrielle a même été contestée. La finalité de cette propriété incorporelle ne peut en effet être celle du droit de propriété tel qu'il est ordinairement entendu. Elle ne réside que dans la protection du commerçant ou de l'industriel contre la concurrence, soit en lui assurant un monopole d'exploitation (brevets d'invention, dessins et modèles), soit en lui conférant un droit privatif sur certains signes de ralliement de clientèle (marques de fabrique et de commerce, nom commercial).
À la différence d'un droit de propriété qui s'exerce sur une chose, le droit de propriété industrielle est non pas perpétuel, mais temporaire. Il est en outre, à certains égards, moins avantageux qu'un droit réel et, à d'autres, plus protecteur. Il est moins avantageux en ce qu'il ne confère pas à son titulaire la propriété de tous les produits qui sont issus de son droit, alors que le titulaire du droit réel peut prétendre aux fruits de la chose sur laquelle s'exerce sa propriété. Ainsi, le titulaire d'un brevet est seulement investi du monopole de la fabrication d'un produit et non de la propriété des produits eux-mêmes. Il est plus protecteur, en revanche, en ce qu'il investit son titulaire d'un droit exclusif de toute concurrence, à la différence d'un droit de propriété sur une chose, qui souffre quant à lui la concurrence.
Un trait commun aux propriétés industrielles les éloigne encore du droit classique de propriété. Il réside dans ce qu'elles ne constituent pas, à l'inverse des droits s'exerçant sur des choses, des propriétés oisives. Leur existence dépend de l'activité ou de la puissance créatrice de l'homme. Cette activité est, selon les cas, soit une activité actuelle (ainsi en est-il des offices, des clientèles civiles ou des fonds de commerce), soit une activité passée matérialisée dans une création de l'esprit (c'est le cas des brevets d'invention).[...]
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Écrit par
- Bernard FAU : avocat à la cour d'appel de Paris, ancien premier secrétaire de la Conférence des avocats à la cour de Paris
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