PROSCRIPTION, Rome
Le mot désigne une affiche qui porte un texte de loi et une liste de noms, ceux de personnages condamnés. Ce genre de publication ne se produisit que dans un contexte de guerre civile, dans le conflit qui opposa les populaires à la nobilitas, c'est-à-dire les citoyens pauvres conduits par quelques aristocrates réformateurs d'un côté, la noblesse traditionaliste de l'autre.
La première proscription eut lieu en ~ 82. Elle fut décidée par Sylla, qui venait de s'emparer de Rome, et visait les partisans de Marius. Cinq cents « ennemis de la patrie » furent désignés. N'importe quel particulier pouvait les exécuter et gagner douze mille deniers par tête rapportée. Les corps des victimes furent jetés au Tibre, leurs biens confisqués et leurs fils exilés. Cette mesure entraîna un important transfert de propriétés et provoqua de nombreux procès. Les fils des proscrits ne furent réintégrés dans leurs droits qu'en ~ 49.
La seconde proscription fut décidée en ~ 43 par les triumvirs, Octave, Antoine et Lépide, et elle visait au premier chef les meurtriers de César, mais aussi tous les républicains, c'est-à-dire, pour l'essentiel, Sextus Pompée, Brutus et Cassius. On publia donc à nouveau un édit et une liste de noms. Un meurtre rapportait vingt-cinq mille drachmes à un homme libre, dix mille et la citoyenneté à un esclave ; les corps des condamnés étaient privés de sépulture, leurs biens saisis. À ces éléments, déjà présents dans la proscription de ~ 82, s'en ajoutèrent deux autres qui firent l'originalité des mesures de ~ 43 : la liste resta ouverte (quelques noms furent rayés et d'autres ajoutés) ; et surtout la décision intervint avant la guerre civile qui devait venger César. Les victimes furent peut-être moins nombreuses que la fois précédente mais elles appartenaient à l'élite du parti adverse qui fut, au propre et au figuré, décapité (Cicéron, par exemple). Les conséquences, multiples, concernèrent la politique (le mouvement aristocratique était anéanti) et le domaine socio-économique (on assista à un nouveau et considérable transfert de propriétés). Sur les ruines de l'ancien ordre sénatorial pouvait naître la nouvelle noblesse, la noblesse d'Empire.
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Écrit par
- Yann LE BOHEC : professeur à l'université de Grenoble
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