PROTECTION DE LA NATURE Mesures de conservation des espèces
La biologie de la conservation
Définition
L'émergence de la biologie de la conservation est une réponse de la communauté scientifique à la crise d'extinction actuelle. De fait, les changements planétaires induits par l'homme précipitent le plus grand épisode d'extinction que la vie ait connu depuis la disparition des dinosaures, il y a 65,5 millions d'années. Si nous ne réagissons pas rapidement et de façon significative, la génération suivante n'aura pas la même opportunité de redresser la situation à laquelle nous faisons face.
Ainsi, la biologie de la conservation est bien, dans tous les sens du mot, une discipline de crise : elle doit passer du statut de science qui enregistre des catastrophes à celui d'une science d'action, qui permette d'élaborer des plans scientifiquement fondés pour empêcher les catastrophes écologiques. C'est une nouvelle discipline de synthèse qui applique les principes de l'écologie, de la biogéographie, de la génétique des populations, de l'anthropologie, de l'économie, de la sociologie, etc., au maintien de la diversité biologique sur l'ensemble de la planète.
La biologie de la conservation présente trois spécificités :
– Elle s'appuie maintenant sur une base théorique et intègre des modèles écologiques et génétiques appliqués à des situations du monde réel.
– Alors que la conservation traditionnelle s'enracine largement dans une philosophie économique de type « utilitaire », dont la motivation première est de maintenir des productions élevées (on s'intéresse à un petit nombre d'espèces – cerfs, truites, essences d'arbre, etc., dont on cherche à maximiser la production – au détriment de la biodiversité), la nouvelle biologie de la conservation accorde de l'importance à l'ensemble de la biodiversité et lui attribue une valeur intrinsèque. Elle considère, dans cette perspective, que la gestion doit être orientée vers la biodiversité et les écosystèmes planétaires plutôt que vers quelques espèces particulières. Des écosystèmes intacts et diversifiés, au fonctionnement durable, apparaissent comme essentiels, véritables « systèmes support de vie » nécessaires pour notre propre développement en tant qu'espèce.
– Enfin, la biologie de la conservation – et il conviendrait pour cela de parler plutôt de science de la conservation, sinon d'écologie de la conservation – embrasse les contributions d'autres disciplines. En particulier, elle reconnaît pleinement que l'apport des sciences sociales, de l'économie, de la science politique peut avoir finalement plus d'impact dans les avancées et la portée réelle de la conservation que les sciences biologiques elles-mêmes.
Trois champs d'intérêt privilégiés
On s'accorde à considérer que la biologie de la conservation s'est construite autour de trois champs d'application majeurs :
– l'écologie des populations déclinantes ;
– la biologie des populations à petits effectifs ;
– la définition de réserves optimales.
Les deux premiers types d'interrogation ont débouché sur des analyses de viabilité dans lesquelles des connaissances de la génétique des populations et de la dynamique des populations et des communautés furent fort utiles.
Dans le cadre du troisième centre d'intérêt, il a beaucoup été fait appel à la théorie de la biogéographie insulaire de Robert MacArthur et Edward Wilson, au détriment de l'écologie des paysages qui paraît aujourd'hui tout aussi pertinente.
Les attributs d'une bonne réserve
Les réserves doivent être conçues de manière à satisfaire les objectifs qui ont conduit à en décider la mise en place. Au-delà de spécificités écologiques propres aux espèces ou aux écosystèmes concernés, la théorie de la biogéographie insulaire et[...]
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Écrit par
- Robert BARBAULT : professeur à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie, directeur du département écologie et gestion de la biodiversité, Muséum national d'histoire naturelle, Paris
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