PROTECTIONNISME
Au sens strict, le protectionnisme désigne les instruments utilisés par un État pour protéger les productions nationales de la concurrence étrangère : droits de douane, quotas d'importation, normes, autorisations administratives. Si l'on adopte un point de vue plus large, le protectionnisme englobe toutes les dispositions ayant un impact sur le commerce extérieur d'un pays donné, non seulement les barrières tarifaires et non tarifaires, mais aussi les aides diverses, directes et indirectes, qui permettent à ce pays de résister à la pénétration des marchandises étrangères ou qui favorisent ses exportations. Certains types de subventions, en particulier les subventions à l'exportation, constituent, à cet égard, une forme répandue et efficace de protectionnisme.
La question de savoir si une nation doit se protéger de la concurrence extérieure et aider ses industries d'exportation ou si elle a plutôt intérêt à accepter le libre-échange tient une place centrale dans les débats entre économistes comme sur les agendas des décideurs, privés et publics. Si la seconde moitié du xxe siècle et le début du xxie sont marqués par un mouvement général d'ouverture, encadré par le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade) puis, à partir de 1995, par l'OMC (Organisation mondiale du commerce), la question des bienfaits de la réduction du protectionnisme reste néanmoins posée, en particulier pour les pays en développement. La réflexion des économistes sur les avantages et les coûts de la protection fait en effet apparaître la complexité de la question, qui nécessite de préciser les conditions dans lesquelles s'effectuent les choix, en termes d'évolution des coûts à long terme, en termes de structure des marchés (concurrentielle ou oligopolistique), et en termes de stratégies (non-coopération ou coopération).
Libre-échange et protectionnisme
Le débat sur les avantages respectifs de la protection et du libre-échange est aussi ancien que la science économique elle-même. Le courant mercantiliste, qui a dominé la pensée économique entre le xvie siècle et la première moitié du xviiie siècle, considère que les États doivent intervenir activement afin d'obtenir, chacun en ce qui le concerne, un solde commercial excédentaire. Cela implique de protéger les activités nationales contre la concurrence des autres grandes puissances et de promouvoir les exportations. En effet, dans la conception mercantiliste, l'excédent commercial est source de richesse pour la nation, puisque son financement fait entrer des métaux précieux dont la présence accroît le pouvoir militaire et donc le poids politique de l'État. Cette vision des relations économiques avec les pays étrangers correspond alors aux politiques effectivement adoptées par les États qui, à cette époque, considèrent comme normal de mettre des barrières aux importations et d'apporter des aides aux activités d'exportation.
Les avantages comparatifs
Les économistes de l'école classique, en particulier David Ricardo (1772-1823), rejettent la vision mercantiliste. Dans leur conception, la richesse d'une nation s'identifie non pas au stock d'or et d'argent détenu par l'État, mais à la masse des marchandises qu'elle peut consommer, en produisant ou en achetant à l’étranger. Ricardo démontre que la suppression de tout obstacle à l'échange, en permettant à chaque pays de se spécialiser dans les productions pour lesquelles il dispose de coûts de production relativement plus faibles, accroît la production mondiale, donc profite à tous. Ce principe, appelé loi des avantages comparatifs, est considéré, encore aujourd'hui, comme l'argument central opposable à ceux qui refusent l'ouverture.
Les thèses postérieures en faveur du libre-échange n'ont fait que reprendre l'intuition[...]
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Écrit par
- Bernard GUILLOCHON : docteur en sciences économiques, professeur émérite à l'université de Paris Dauphine
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