PROTESTANTISME Les Églises protestantes de la fin de la Réforme au début du XXe s.
Les mutations du XIXe siècle
Le xixe siècle a été marqué par des mutations considérables qui étaient liées aux changements politiques ou territoriaux (de 1815) et à l'industrialisation, et qui ont eu pour caractéristiques la contestation des liens avec l'État, un puissant Réveil, une diversification considérable des tendances théologiques, la vitalité diaconale et missionnaire, une pensée théologique enfin qui a mis l'accent sur l'histoire et qui a donné lieu à de grands traités, tels ceux de Ritschl et de Harnack.
Après la Révolution, la Restauration a encouragé les États à redéfinir leurs relations avec les Églises en vue de mieux les contrôler. En Allemagne, le redécoupage territorial a incité plusieurs princes, suivant l'exemple de la Prusse, à réunir luthériens et réformés dans une Église unie. En Scandinavie, on assiste à une adaptation des structures à la situation nouvelle. Les contestations débouchent assez souvent, notamment en France et aux Pays-Bas, à la formation d'Églises libres.
Dans la diversité théologique, s'affirment trois courants principaux. Le rationalisme se mue en un libéralisme, qui est parfois proche de la maçonnerie et qui est très répandu chez les intellectuels et chez les notables ayant une influence politique et économique. Ce libéralisme affaiblit la vitalité religieuse (recul de la pratique) et la spiritualité par un enseignement axé sur la morale et le progrès économique. Certains de ses représentants en viennent à nier même l'existence historique de Jésus.
Dans le sillage du romantisme est apparu le Réveil, qui a pris des modalités diverses et qui fut favorisé par Schleiermacher (1768-1834). Ce dernier a ramené le fait religieux sur le terrain du sentiment ; sa religion est une grandeur qui est autonome à l'intérieur du sentiment et sa théologie tente une médiation entre l'esprit libre et les éléments chrétiens. Le Réveil, qui affecte toute l'Europe protestante entre 1800 et 1850, consiste en un renouveau religieux, accompagné, dans les pays anglo-saxons, de conversions en masse, le plus souvent dans un cadre d'excitation émotionnelle. Il a été illustré notamment par Alexandre Vinet (1797-1847), professeur à Lausanne et apôtre de l'individualisme chrétien, et par le pasteur danois Grundtvig (1783-1872).
Face à ces deux mouvements, se dessina une réaction conservatrice. En Allemagne, elle s'exprima dans le néo-luthéranisme, qui privilégie l'orthodoxie doctrinale et le ritualisme et qui demeure souvent favorable à une réglementation hiérarchique et patriarcale. Un courant parallèle s'affirma en Angleterre sous la forme du sacramentalisme et du ritualisme.
Le développement de la tolérance, la diffusion de la culture dans des milieux sociaux plus étendus et l'insatisfaction face à certains pasteurs de l'Église officielle provoquent la diffusion d'idées hétérodoxes qui donnent naissance à un foisonnement de sectes à travers tout l'espace protestant. Les courants principaux sont les adventistes (chiliastes), les pentecôtistes (glossolalie, guérison de malades) et les mennonites.
La prise de conscience de l'éparpillement des groupes religieux, mais aussi des solidarités qui les unissent, incite, vers la fin du xixe siècle, les responsables des grandes dénominations à opérer un regroupement à l'échelle mondiale. Sont ainsi constituées : en 1875, l'Alliance réformée mondiale ; en 1881, la Conférence œcuménique méthodiste ; en 1891, l'Union internationale des congrégationalistes ; en 1905, l'Alliance mondiale baptiste et, en 1923, l'Alliance luthérienne mondiale.
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Écrit par
- Bernard VOGLER : docteur ès lettres, professeur d'histoire de l'Alsace à l'université de Strasbourg-II
Classification
Média
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