PROTOHISTOIRE
Naissance de la métallurgie
La naissance de la métallurgie européenne fut longtemps perçue comme le simple reflet d'inventions issues précocement d'Asie Mineure ou du monde méditerranéen. En Europe continentale, les premières routes du cuivre étaient jalonnées d'objets manufacturés tels que les torques à enroulement qui, provenant de Syrie ou du Liban, auraient été échangés jusqu'en Bohême (Allemagne actuelle) et même jusque dans l'est de la France. De Chypre, un trafic de « poignards chypriotes » aurait gagné jusqu'aux îles Britanniques. En réalité, ces derniers objets ont été bien souvent apportés dans les musées occidentaux par les antiquaires du xixe siècle. Quant aux torques à enroulement, très vite l'Europe centrale sut, à partir de quelques prototypes peut-être d'origine méditerranéenne, créer ses propres centres de production. Enfin, les recherches récentes ont prouvé la multiplication de centres indigènes producteurs de cuivre dès le IIIe millénaire et peut-être plus tôt selon les interprétations que l'on fait des datations au radiocarbone. Dans des puits d'extraction de cuivre situés à Rudna Glava, en ex-Yougoslavie, B. Jovanovic a ainsi mis au jour des poteries et des idoles typiques de la civilisation régionale néolithique de Vinça. Certains centres chalcolithiques en Almérie ont pu être datés du IIIe millénaire. Dans le sud de la France, l'exploitation locale du cuivre, plus tardive, permet aux groupes languedociens une activité métallurgique déjà remarquable vers 2200 avant J.-C. Toutefois, entre ces premières exploitations indigènes et le développement de grandes civilisations du métal, se produit un décalage chronologique important. C'est peu avant le IIe millénaire que certains groupes humains vont, par leur action, modifier non seulement l'équipement matériel mais les structures sociales et religieuses propres aux ethnies néolithiques. Ainsi, en Europe nordique et centrale, joue l'influence des groupes cordés dénommés de la sorte à cause de leur gobelet funéraire décoré d'impressions de cordelettes. Ils vulgarisent l' inhumation individuelle en coffre, contrastant avec l'usage des sépultures collectives plus usuelles au Néolithique, qu'il s'agisse d'ossuaires en grottes, de grands cimetières ou de monuments mégalithiques. On a parfois suggéré que ces Cordés étaient déjà des Indo-Européens. Ils connaissent le métal ou, du moins, savent dans leurs haches de combat en pierre imiter les défauts de moulage des premières haches en cuivre déjà produites en Hongrie, à l'inspiration de lointains prototypes anatoliens.
En Europe occidentale, la diffusion du métal est due aux groupes campaniformes dont le gobelet funéraire, une poterie en forme de cloche renversée, est décoré au pointillé, à la roulette ou à la corde, de décors souvent disposés en zones horizontales. Outre les poteries, les tombes contiennent de menus objets d'or, de petits poignards à languette et des javelines de cuivre dites pointes de Palmela, du nom d'un site portugais. La péninsule Ibérique est un foyer campaniforme important ; vers 1929, A. de Castillo émit tout d'abord la théorie colonialiste d'un peuple conquérant issu de Castille. Vers 1930, G. Childe considérait le « peuple campaniforme » comme composé de petits groupes de forgerons-pasteurs itinérants parcourant l'Europe, de l'Irlande à la Bohême et de l'Ibérie aux Pays-Bas. La complexité du phénomène campaniforme résulte d'interactions entre de multiples groupes régionaux identifiables grâce à leurs poteries qui diffèrent par des détails infimes. Si les courants de retour, les métissages avec des groupes cordés compliquent l'étude de ces populations, il est certain qu'elles jouèrent un rôle important non seulement dans la diffusion du[...]
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Écrit par
- Jacques BRIARD : maître de recherche au C.N.R.S.
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