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PROVENCE, histoire

La Provence aux XIXe et XXe siècles

Une longue tradition d'opposition, puis de radicalisme

Officiellement, de 1790 (division de l'ancienne province en départements) à 1956 (création de la « région de programme » Provence-Côte d'Azur-Corse), il n'y a plus d'entité politico-administrative provençale. Mais on peut suivre presque jusqu'à la fin du xixe siècle une relative communauté de destin et de caractère des départements du Midi méditerranéen à l'est du Rhône. Celle-ci apparaît de manière très claire dans l'originalité du comportement politique des Provençaux : ardeur exemplaire dans les trois premières années de la Révolution, brusque retournement en 1793 avec la révolte fédéraliste (les Anglais à Toulon, le siège de la ville par Bonaparte), prépondérance ultra-royaliste culminant avec la Terreur blanche de 1815 (Avignon, Marseille) et le bon accueil fait à la Restauration ; puis, en quelques décennies, on assiste à un nouveau retournement : la déchristianisation progresse rapidement, le royalisme passionné fait place à l'exaltation républicaine et l'originalité régionale se manifeste désormais par l'avant-gardisme radical, puis socialiste, parfois révolutionnaire (mouvements antibonapartistes de décembre 1851, Commune de Marseille en 1871). Sous la IIIe et la IVe République, les départements ci-devant provençaux se caractérisent comme l'un des domaines de la gauche. Certains ont interprété cette constance dans l'originalité politique comme une forme inconsciente d'esprit régional. Bien indirecte et latente en tout cas, car les « rouges du Midi », électeurs de Gambetta, de Clemenceau ou de Daladier, s'affirmaient très républicains et patriotes français, même quand ils étaient parallèlement ralliés à la défense ou à la culture du folklore méridional.

Depuis les années cinquante, l'extrémisme politique de gauche paraît en recul, du moins dans les anciens bastions ruraux qui avaient spécifiquement assuré ses majorités massives de 1876, de 1936 ou de 1946.

Le phénomène Côte d'Azur

Les mutations récentes s'expliquent par les changements qui ont affecté la texture même du pays. En récupérant définitivement le comté de Nice en 1860, la Provence française paraissait retrouver son intégrité d'avant 1388 ; en fait, elle rencontrait là un élément puissant de diversification, sinon de dislocation. Non pas tant parce que Nice aurait été en cinq siècles fortement italianisée, mais parce que Nice possédait déjà une vocation et une fonction touristique et cosmopolite affirmées.

À partir de Nice, qui en est le foyer, se développe l'ensemble de phénomènes économiques et sociaux bien particuliers qu'évoque le nom de la Côte d'Azur. Depuis un siècle, celle-ci a gagné progressivement le littoral d'est en ouest et métamorphosé l'arrière-pays sur une bande côtière de plus en plus large. De nos jours, tout l'est du département du Var est déjà perçu comme appartenant à « la côte » au moins autant que comme « provençal ». Le nom de Provence-Côte d'Azur donné par l'administration à la région économique actuelle reflète bien ce nouveau dualisme, et il est significatif que beaucoup de Niçois se plaignent d'avoir Marseille pour capitale.

La métamorphose économique contemporaine

Marseille a bien en effet supplanté Aix. Chef-lieu des Bouches-du-Rhône et métropole régionale, elle est surtout une très grande ville dont l'impressionnante croissance (en chiffres ronds, 100 000 habitants à la fin de l'Ancien Régime, 300 000 à la fin du second Empire, 850 550 au recensement de 1999) déséquilibre l'ensemble. En forçant un peu les choses, on pourrait dire que ce qui reste de Provence a tendu à se partager entre une puissante région marseillaise et une Provence intérieure relevant[...]

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Arles (Bouches-du-Rhône) - crédits : Gerard Sioen/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Arles (Bouches-du-Rhône)

Baux-de-Provence, Bouches-du-Rhône - crédits : C. Sappa/ De Agostini/ Getty images

Baux-de-Provence, Bouches-du-Rhône

Gordes - crédits : Riccardo Lombardo/ Reda&Co/ Universal Images Group/ Getty Images

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