PS (Parti socialiste), France
La laborieuse transformation en parti de gouvernement
Présidentialisation du parti (1981-1988)
L'élection de François Mitterrand en 1981 a été rendue possible par la construction d'une machine électorale et militante puissante qui a engrangé au cours des années 1970 de nombreux succès électoraux et s'est dotée d'un personnel politique rajeuni ayant acquis une première expérience de gestion à la tête des grandes villes, des conseils généraux et régionaux. Pour autant, cette machine est loin de disposer d'un appareil de permanents comparable à celui du PCF ou des autres partis sociaux-démocrates. Faute de liens organiques avec des syndicats, des mutuelles ou des banques (hormis celles de la « galaxie enseignante »), faute de disposer d'un important groupe de presse et d'édition, la machine PS repose avant tout sur un nombre restreint de bénévoles et de très nombreux élus locaux. Or les conquêtes électorales successives ont pour effet de dévitaliser le parti à tous les niveaux, ses cadres étant happés par les responsabilités électives ou gouvernementales.
Au sommet, le PS se transforme en « parti du président ». Même s'il prend la précaution d'intégrer tous les courants au sein du gouvernement, Mitterrand affirme d'emblée sa prééminence en nommant aux postes clés de son cabinet, du gouvernement, du groupe parlementaire et du parti des « fidèles » : anciens conventionnels (Charles Hernu à la Défense, Louis Mermaz à la présidence de l'Assemblée nationale, Pierre Joxe et Claude Estier respectivement à la tête des groupes socialistes de l'Assemblée et du Sénat, Robert Badinter à la Justice, Édith Cresson à l'Agriculture...) ou « sabras » de son courant (Lionel Jospin, nouveau premier secrétaire assisté de Paul Quilès, Laurent Fabius au Budget, Pierre Bérégovoy au secrétariat général de l'Élysée ou Jack Lang à la Culture...). La confortable majorité parlementaire (285 députés contre 115 en 1978) et l'inexpérience de nombreux députés dont beaucoup, élus par surprise, sont surtout préoccupés de consolider leur implantation locale, facilitent l'emprise des hommes du président.
Certes, entre 1981 et 1986, afin d'assurer la cohérence de l'action gouvernementale, les conseils des ministres et les réunions interministérielles sont doublés de réunions bihebdomadaires entre le président et les leaders du parti d'une part et du courant mitterrandiste d'autre part. Le premier secrétaire et le président du groupe parlementaire sont associés à toutes les grandes décisions du premier septennat. Mais, comme le remarque le politologue Hugues Portelli, c'est là avant tout un « moyen pour François Mitterrand de déconcentrer son arbitrage du fait de la maîtrise totale de l'Élysée sur les sommets de l'État ». Les nouveaux dirigeants du parti se voient également privés de toute expertise propre, la quasi-totalité des membres des commissions spécialisées du parti, pour l'essentiel composées de hauts fonctionnaires, ayant intégré les cabinets ministériels. Il faudra attendre 1987, une fois le parti revenu dans l'opposition, pour que Jospin s'adjoigne les services d'une commission d'experts et pour que les commissions spécialisées reprennent vie.
Les grandes orientations gouvernementales ne font pour ainsi dire pas clivage au sein du PS et n'y sont que peu débattues dans les sections. Seul le choix de rester dans le système monétaire européen (SME) en 1983 provoque un débat militant. Jean-Pierre Chevènement, qui a quitté le gouvernement pour protester contre « le tournant de la rigueur » – il y reviendra un an plus tard comme ministre de l'Éducation nationale chargé de rétablir la paix scolaire –, dépose alors au nom du CERES une motion au congrès de Boug-en-Bresse (octobre 1983) réclamant « une autre[...]
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Écrit par
- Frédéric SAWICKI : professeur de science politique à l'université de Lille-II
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