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PSYCHANALYSE

Des mythes transférentiels à la mythologie des pulsions

Un fait domine cette élaboration. L'expérience du transfert n'a pu recevoir son statut théorique avant que l'analyse des psychoses ne l'ait assurée, dans la régression, de sa dimension propre. Fait paradoxal au premier abord, s'il est vrai que la psychose, du point de vue de la praxis psychanalytique, se caractérise précisément par son incapacité à donner prise au transfert. Pourtant, c'est à des dates voisines que l'analyse de la paranoïa de Schreiber donne corps à la notion de régression, et que cette même notion est invoquée en manière d'introduction à l'article sur la Dynamique du transfert (1911). De même qu'il est significatif que ce soit en un même chapitre de l'Introduction à la psychanalyse que Freud ait choisi de traiter du transfert, et des limites de son instauration. Nous avons donc lieu de penser que les deux problèmes se sont présentés conjointement, et que le transfert doit se comprendre dans l'unité de ses conditions d'émergence et de ses conditions d'exclusion ; plus précisément s'agira-t-il de déterminer à quel titre la régression interdit au psychotique l'accès du transfert, et cependant en précipite et en scande le mouvement dans le cas des névroses de transfert.

Formes et moments du transfert

Partons de la première esquisse d'une définition générale, dégagée par Freud dans l'analyse du cas Dora, publiée en 1905. La productivité de la névrose au cours de la cure, écrit-il, « n'est nullement éteinte, elle s'exerce en créant des états psychiques particuliers, pour la plupart inconscients, auxquels on peut donner le nom de transferts. Que sont ces transferts ? Ce sont de nouvelles éditions, des copies des tendances et des fantasmes qui doivent être éveillés et rendus conscients par les progrès de l'analyse, et dont le trait caractéristique est de remplacer une personne antérieurement connue par la personne du médecin. Autrement dit, un nombre considérable d'états psychiques antérieurs revivent, non pas comme états passés, mais comme rapports actuels avec la personne du médecin. Il y a des transferts qui ne diffèrent en rien de leur modèle quant à leur contenu, à l'exception de la personne remplacée. Ce sont donc [...] de simples rééditions stéréotypées, des réimpressions [...]. D'autres sont des éditions revues et corrigées [...]. Si l'on considère la théorie de la technique psychanalytique, on se rend compte que le transfert en découle nécessairement [...] la sensation de conviction relative à la justesse des connexions construites (die Richtigkeit der konstruierten Zusammenhänge) n'est éveillée chez le malade qu'une fois le transfert résolu. »

Le tout est de comprendre à quel titre l'expérience du transfert justifie l'image des « éditions successives » par laquelle Freud a choisi de le caractériser. Une indication générale nous est apportée par l'article sur la Dynamique du transfert : en chacun des « états psychiques antérieurs » que la théorie de la régression aura permis de restituer, nous avons à cerner dans sa particularité celui de ses moments qui est « susceptible de se reporter sur la personne du médecin ». Mais quelle en est la nature ? Un texte décisif nous en instruira, où la solidarité, confusément introduite par l'analyse de Dora, entre la « conviction » du patient et le transfert est amenée à sa place centrale, pour y être élucidée en référence à l'assomption actuelle du refoulé.

La notion nous est déjà familière, dans la perspective de l'opposition entre interprétation et construction. Mais nous touchons ici à son avènement dans l'épreuve de la praxis analytique. « Vingt-cinq années de travail intensif, écrit Freud dans Au-delà du[...]

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Écrit par

  • : professeur honoraire de philosophie à l'université de Paris-X-Nanterre

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L'exil de Freud - crédits : Keystone/ Getty Images

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