PSYCHODRAME
Les applications thérapeutiques
Le psychodrame occupe désormais une place importante parmi les méthodes de psychothérapie. On l'utilise chez les adultes, mais plus largement chez les enfants et les adolescents. Il semble en effet que, indépendamment de la nature des troubles, une certaine étape du développement, entre treize et seize ans, constitue une indication particulière du psychodrame : l'adolescent s'exprime volontiers par le jeu dramatique, tandis que, plus jeune, le sujet recourt par prédilection au jeu et au dessin et que, plus tard, il peut par la parole exprimer avec suffisamment de nuances et de confiance ce qu'il ressent ou imagine. À cet âge intermédiaire, jeu et dessin ayant perdu leur intérêt et la communication par la parole demeurant difficile et pauvre ou se perdant en rationalisations très éloignées de ce qui est éprouvé réellement, le psychodrame est en général bien accepté.
Indépendamment de l'âge, cette technique s'applique à des organisations psychopathologiques diverses. À de grands malades dont la personnalité est atteinte en profondeur et qui sont gravement coupés du monde extérieur, notamment par de longues hospitalisations, le psychodrame, faisant suite à la théâtrothérapie de jadis, offre des possibilités nouvelles d'expression. Il leur permet de sortir de leur isolement et facilite leur insertion dans le groupe, laquelle retrouve ainsi sa portée thérapeutique. Les techniques les plus diverses, moréniennes ou psychanalytiques, sont alors utilisées.
Des organisations pathologiques sévères (psychoses, états névrotiques graves) mais compatibles avec la vie dans le milieu habituel peuvent également tirer bénéfice du psychodrame, qu'on utilise volontiers alors sous la forme du psychodrame psychanalytique individuel. Le traitement s'applique en général à un seul patient. Il est assuré par un psychothérapeute principal et plusieurs psychothérapeutes auxiliaires. Celui-là dirige les séances mais ne joue pas ; la relation qu'il établit avec le malade est donc comparable à celle qui s'observe dans la psychanalyse. Les thérapeutes auxiliaires assurent seulement la réalisation dramatique impliquée dans le récit du patient. Leur fonction est donc instrumentale et tout à fait distincte de celle du psychothérapeute principal. C'est lui qui dialogue avec le patient, invite ce dernier à « dramatiser » une situation réelle ou imaginaire qui vient d'être évoquée et, à l'occasion, indique comment les auxiliaires psychodramatistes doivent jouer pour permettre une interprétation des fantasmes et des conflits sous-jacents. Dans un tel cadre thérapeutique, il n'est pas étonnant que les effets de groupe s'atténuent au profit des effets de transfert et que l'interprétation de ceux-ci fasse de cette cure une variante psychodramatique de la cure psychanalytique. Cette méthode coûteuse – elle mobilise plusieurs thérapeutes pour un seul malade – est indiquée dans certains cas où la psychanalyse classique serait peu efficace ou mal supportée.
Dans des cas plus légers, et notamment chez l'enfant (troubles névrotiques, conflits familiaux, crises de développement, troubles du caractère), on utilise volontiers une autre forme de psychodrame psychanalytique, à savoir une thérapeutique, soit de groupe soit individuelle, dans laquelle intervient habituellement un couple de thérapeutes, homme et femme. Comme souvent lorsqu'on a affaire à l'enfant, il s'agit alors d'une psychothérapie d'inspiration psychanalytique plutôt que d'une psychanalyse. Les effets de transfert et la régression ne s'y observent pas avec autant de netteté que dans celle-ci. On tend, par contre, à combiner les effets de la relation psychanalytique avec ceux de l'improvisation dramatique. L'enfant utilise fréquemment des moyens de défense très efficaces contre les conflits internes et les sentiments[...]
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Écrit par
- Daniel WIDLÖCHER : professeur de psychiatrie à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie, chef de service de psychiatrie (adultes) au groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière
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