PSYCHOLOGIE CLINIQUE DU COUPLE
La thérapie de couple
La thérapie de couple est une héritière du conseil conjugal, né à la fin des années 1920. Il s’agissait à l’époque de « bons conseils » pratiques portant sur la vie commune. À partir des années 1960, le conseil conjugal a également pris en compte les aspects émotionnels de la relation et s’est mué progressivement en thérapie. Un ensemble de traitements a alors été développé, qui mettent l’accent sur l’une ou l’autre dimension relationnelle selon leurs perspectives théoriques :
– les approches psychodynamiques, qui s’intéressent aux projections que font les partenaires l’un sur l’autre de conflits non résolus issus de leur histoire relationnelle précoce ;
– les approches systémiques, pour lesquelles le pouvoir est au centre de la relation ; les difficultés dans le couple découlent d’une structure hiérarchique soit confuse (il n’y a pas de répartition claire des rôles), soit rigide (le pouvoir est tenu par un seul des partenaires ou alors les deux partenaires s’affrontent pour le contrôle) ;
– les approches humanistes, qui mettent l’accent sur le rôle que joue le couple dans la construction d’une estime de soi forte et dans l’accomplissement de besoins émotionnels ; une non-réponse d’un partenaire au besoin émotionnel de l’autre crée une blessure d’attachement qui met à mal la relation ;
– les approches cognitivo-comportementales, qui se focalisent sur les cognitions dysfonctionnelles. La relation est en danger dès lors que l’un des partenaires (ou les deux) a des attentes irréalistes (par exemple que l’autre soit capable de « lire » les émotions vécues par soi sans qu’il soit nécessaire de les exprimer). D’autres thérapies de cette obédience mettent l’accent sur la communication et la gestion du stress à deux.
Les évaluations « basées sur les évidences » (qui comparent des groupes de couples ayant suivi un traitement avec des groupes de couples restés sur liste d’attente) ont montré l’efficacité de ces thérapies, notamment pour réduire la communication négative (blâmes, critiques) et augmenter la capacité d’écoute mutuelle. L’amélioration relationnelle reste toutefois souvent modeste : la satisfaction augmente, mais pas suffisamment pour faire envisager la relation sous un meilleur jour. Cet effet en demi-teinte s’explique d’abord par le fait que les couples tendent à consulter alors que la relation est déjà fortement détériorée, ce qui rend l’amélioration plus compliquée ; ensuite, par le fait que, s’il est fréquent que la thérapie ait de l’effet pour l’un des partenaires, l’amélioration n’est conjointe que dans un couple sur deux ; enfin, par le fait que le critère de réussite de la thérapie est très conservateur dans la plupart des études puisqu’il s’agit du maintien de la relation. Un critère à prendre en compte serait la valeur d’un traitement pour accompagner le couple à se séparer dans les meilleures conditions possible.
La sexualité a quant à elle une place ambiguë dans la clinique du couple. Elle a longtemps été et est encore l’objet de traitements spécifiques ; depuis la fin des années 1980, les thérapies sexuelles ont pris un virage médical, avec un accent de plus en plus fort mis sur les traitements mécaniques et médicamenteux des dysfonctions sexuelles. Les thérapies sexuelles et les thérapies de couple basées sur des dimensions émotionnelles sont restées largement dissociées les unes des autres.
Conclusion. La psychologie clinique du couple a permis de mettre en évidence des dimensions relationnelles spécifiques de la relation intime et d’élaborer des techniques d’intervention dont l’efficacité a été démontrée. Elle a toutefois plusieurs limites, parmi lesquelles une focalisation prédominante sur des couples hétérosexuels mariés et une difficulté à rendre compte de concepts holistiques comme[...]
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Écrit par
- Nicolas FAVEZ : docteur en psychologie, professeur ordinaire
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