- 1. Qu’est-ce qu’une émotion ?
- 2. L’émotion est-elle une expression ?
- 3. L’émotion est-elle une réaction corporelle ?
- 4. L’émotion est-elle une motivation ?
- 5. L’émotion est-elle un ressenti ?
- 6. L’émotion est-elle une cognition ?
- 7. Comment les émotions sont-elles régulées ?
- 8. L’émotion favorise-t-elle la connaissance ?
- 9. Bibliographie
PSYCHOLOGIE DES ÉMOTIONS
L’utilisation du terme « émotion » dans son acception actuelle n’a été préférée à « passion », « affection » ou « sentiment » que depuis deux siècles ; cependant, les études historiques suggèrent que l’analyse des émotions en tant que phénomènes psychologiques, corporels et sociaux date au moins de l’Antiquité. Des penseurs tels qu’Aristote, René Descartes ou Charles Darwin ont largement contribué à enraciner d’importantes problématiques émotionnelles au sein de nombreux champs de la connaissance. Grâce à ces fondements et aux développements récents de la psychologie, de la philosophie de l’esprit, des neurosciences, de l’informatique et, plus largement, des disciplines formant les sciences cognitives et affectives, l’étude de l’émotion s’est fortement développée au xxe siècle. Les questions ayant guidé les études conceptuelles et empiriques sont nombreuses : comment nos émotions sont-elles déclenchées, exprimées et régulées ? Comment les mesurer ? Quelles sont leurs fonctions ? À quel point sont-elles partagées avec les autres animaux ? Comment se développent-elles au cours de la vie ? Comment sont-elles représentées dans le cerveau et dans le reste du corps ? S’opposent-elles à la raison ? Sont-elles un moteur de l’action ? Comment caractériser les troubles émotionnels et leurs liens avec des psychopathologies telles que la dépression, l’anxiété ou encore l’autisme ?
Cette synthèse expose les conceptions principales portant sur la nature de l’émotion et ses fonctions. Nous présenterons donc les principales définitions et classifications de l’émotion, puis aborderons les composantes de celle-ci et leurs mesures, en considérant les grands courants théoriques la concernant. Enfin, nous nous intéresserons à la question de la régulation des émotions et des effets positifs de l’émotion sur de nombreux mécanismes cognitifs tels que l’attention, la mémoire et la prise de décision.
Qu’est-ce qu’une émotion ?
En définissant les émotions, ou pathê, comme « tous ces sentiments qui changent l’homme en l’entraînant à modifier son jugement et qui sont accompagnés par la souffrance ou le plaisir » (Rhétorique, livre II, chap. 1, 1378a), Aristote formule ce que l’on considère comme l’une des premières définitions des émotions. Depuis, un grand nombre de définitions ont été proposées et été classées en dix catégories :
– affectives (accent sur la perception d’activation physiologique et (ou) la valeur hédonique) ;
– cognitives (accent sur l’évaluation cognitive et (ou) les processus de labellisation) ;
– situationnelles (accent sur les situations susceptibles de déclencher l’émotion) ;
– physiologiques (accent sur les mécanismes physiques internes de l’émotion) ;
– comportementales (accent sur les réponses émotionnelles observables de l’extérieur) ;
– axées sur les effets perturbateurs (accent sur les effets dysfonctionnels de l’émotion) ;
– adaptatives (accent sur les effets organisateurs ou fonctionnels de l’émotion) ;
– multicomponentielles (accent sur les diverses composantes interconnectées de l’émotion) ;
– restrictives (différenciant l’émotion d’autres processus psychologiques) ;
– motivationnelles (accent sur la relation entre émotion et motivation).
Aucune taxonomie exhaustive de l’émotion n’a recueilli de consensus, mais certaines catégories sont toutefois très utilisées dans la littérature scientifique. Ces taxonomies s’appuient sur divers critères, et les catégories se chevauchent souvent, car une émotion donnée (par ex. la peur) appartient à plusieurs catégories à la fois. Ainsi, les émotions sont souvent catégorisées en fonction de leur valence : une émotion est dite positive si « le ressenti est agréable » ou négative si « le ressenti est désagréable ». Selon certains chercheurs, un[...]
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Écrit par
- David SANDER : professeur à l'université de Genève, directeur du Centre interfacultaire en sciences affectives, Genève (Suisse)
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Média