- 1. Qu’est-ce qu’une émotion ?
- 2. L’émotion est-elle une expression ?
- 3. L’émotion est-elle une réaction corporelle ?
- 4. L’émotion est-elle une motivation ?
- 5. L’émotion est-elle un ressenti ?
- 6. L’émotion est-elle une cognition ?
- 7. Comment les émotions sont-elles régulées ?
- 8. L’émotion favorise-t-elle la connaissance ?
- 9. Bibliographie
PSYCHOLOGIE DES ÉMOTIONS
L’émotion favorise-t-elle la connaissance ?
L’opposition entre cognition et émotion a souvent dominé la recherche, et le fonctionnement cognitif a été typiquement étudié séparément des processus émotionnels considérés comme néfastes au bon fonctionnement de l’esprit. Cependant, les recherches expérimentales suggèrent des effets positifs de l’émotion sur de nombreuses activités cognitives telles que la perception, l’attention, la mémoire et la prise de décision. Par exemple, nos émotions nous informent sur des événements qui sont pertinents pour nos besoins, buts, valeurs et, globalement, pour notre bien-être. Elles déterminent comment nous percevons notre environnement en orientant notre attention vers des stimuli ayant une pertinence affective. Il a ainsi été montré que de nombreux stimuli à haute pertinence affective peuvent attirer l’attention, par exemple des stimuli menaçants tels que des araignées ou des expressions de colère, mais également des stimuli positifs tels que des visages de bébés ou des images érotiques. Au-delà de leur impact marqué sur l’attention, des recherches suggèrent que les émotions peuvent avoir un effet facilitateur sur chacune des trois étapes de l’activité mnésique : l’encodage, la consolidation et le rappel. Ce processus de facilitation mnésique expliquerait pourquoi les situations personnelles à forte charge émotionnelle (par ex. la naissance d’un enfant ou un traumatisme) sont mieux mémorisées, avec l’impression que les souvenirs sont plus clairs et détaillés. La valeur émotionnelle des stimuli facilite également l’apprentissage associatif, par exemple par conditionnement, grâce à des processus automatiques. Les effets de l’émotion sur la prise de décision sont parmi les plus étudiés dans des situations personnelles, sociales, économiques, environnementales ou morales. Les travaux à la frontière entre la psychologie et l’économie indiquent comment nos réactions émotionnelles, qui varient selon les contextes dans lesquels les options de la décision sont présentées, influencent nos choix. Certains modèles distinguent deux types d’effets émotionnels : le premier, fonctionnel, concerne l’effet des émotions intégrées au processus de décision en étant directement déclenchées par la valeur affective des options disponibles (comme voter en fonction de ses valeurs politiques) ; le second, potentiellement dysfonctionnel, concerne l’effet des émotions incidentes, c’est-à-dire l’effet d’émotions qui ne sont pas déclenchées directement par les options mais par exemple présentes au moment où les options sont proposées (comme avoir peur au moment de voter à cause d’un élément graphique du contenu d’une affiche de propagande aperçue dans la rue). Un des arguments qui lie les émotions à la prise de décision consiste à souligner combien certains patients ayant des troubles émotionnels ont des difficultés à prendre des décisions personnelles, sans que cela ne soit accompagné d’un autre problème cognitif.
Ces démonstrations selon lesquelles l’émotion serait au cœur du fonctionnement de l’esprit nous permettent de conclure sur le rôle des émotions pour le bien-être individuel et dans de nombreuses sphères de la société. Mieux comprendre les émotions normales permettrait d’améliorer la santé mentale, étant donné que nombre de dysfonctionnements émotionnels sont caractéristiques de psychopathologies telles que l’anxiété, la dépression ou l’autisme. De manière plus générale, étant donné les liens entre émotions et systèmes immunitaire et cardiovasculaire suggérés par la recherche, une prise en compte des émotions déboucherait sur une meilleure gestion de la santé. Par ailleurs, comprendre le rôle des émotions dans la créativité, les jugements esthétiques et l’adhésion aux œuvres de fiction est un enjeu important dans les domaines artistiques. Un autre domaine concerne[...]
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Écrit par
- David SANDER : professeur à l'université de Genève, directeur du Centre interfacultaire en sciences affectives, Genève (Suisse)
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Média