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PSYCHOSE (psychanalyse)

Les psychoses infantiles

C'est très tardivement que la psychiatrie infantile s'est libérée de classifications et de descriptions empruntées à la clinique des adultes. L'individualisation des psychoses infantiles par rapport aux concepts de démence précoce et de schizophrénie en est une illustration. Jusqu'au début du xxe siècle, les différents tableaux de pathologie mentale de l'enfant furent confondus sous les vocables d'« idioties congénitales ou acquises », de démences, d'épilepsie. Le mouvement psychanalytique, en mettant l'accent sur les tout premiers stades du développement émotionnel et sur l'importance des premières expériences vécues par le jeune enfant, permit une compréhension dynamique et structurale de l'évolution psychique normale et pathologique. Par la suite, un changement méthodologique est intervenu qui fait passer de l'étude des mécanismes intrapsychiques à celle des interactions entre l'individu et son milieu familial et qui s'appuie notamment sur les recherches contemporaines en psychothérapie familiale ou sur des observations de bébés conduites dans des familles à transaction psychotique. De nouvelles perspectives d'application se dégagent de ces travaux, aussi bien pour le diagnostic précoce et la thérapeutique que pour la clinique préventive.

Les psychoses de l'enfant peuvent se manifester très tôt, dès la première année de la vie ; des traits spécifiques d'organisation mentale les caractérisent, qui donnent lieu à des tableaux cliniques différents suivant l'âge, le degré d'évolution libidinale, les régressions et fixations survenues au cours du développement. Le polymorphisme clinique et structural est important : il va des formes à prédominance déficitaire aux formes pseudo-névrotiques ou caractérielles, cas limites, border line ou prépsychotiques selon la terminologie employée. On peut, schématiquement, distinguer les psychoses de développement, dans lesquelles la personnalité s'organise dès les premiers mois de la vie sur le mode pathologique (comme c'est le cas dans l'autisme infantile précoce), et les psychoses de déstructuration, ou schizophrénies infantiles, qui s'installent généralement après une phase de développement exempte de troubles patents, et dont l'expression clinique se rapproche de celle des schizophrénies juvéniles. Quelle que soit leur orientation clinique et théorique, tous les auteurs contemporains s'accordent sur la nécessité d'un diagnostic très précoce de la psychose, de manière à éviter le risque d'une évolution déficitaire, qui, en l'absence d'un traitement adéquat au moment le plus favorable, serait inéluctable : quand on a affaire à l'autisme, le temps qu'on a perdu à l'âge où les fonctions cognitives et les premières intégrations de la personnalité connaissent leur développement le plus rapide est difficilement rattrapable.

Aperçu historique

L'individualisation de la psychose infantile s'est opérée en trois étapes. En 1906, Sancte de Sanctis décrivit une dementia precocissima catatonica survenant chez des enfants de quatre à dix ans et caractérisée par une évolution chronique et démentielle conformément au schéma kraepelinien. En 1908, Heller rapporta également des cas de dementia infantilis comme s'il s'agissait d'une entité clinique indépendante.

La deuxième étape fait suite aux travaux de Bleuler (1911). Ce n'est plus alors le critère évolutif qui est considéré comme essentiel, mais un trouble primaire des fonctions psychiques : la dissociation ou dislocation ( Spaltung) entraînant des symptômes secondaires tels que le délire et l'autisme. La notion de schizophrénie (dementia praecox ou groupe des schizophrénies), apparue à ce moment, est reprise à propos de l'enfant[...]

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Écrit par

  • : professeur de psychopathologie à l'université de Paris-VII, directeur du Laboratoire de psychopathologie, directeur de formation doctorale, chargé de mission pour la création de l'Institut interuniversitaire européen, codirecteur de la Revue internationale de psychopathologie
  • : médecin-général inspecteur, ancien professeur du Val-de-Grâce, directeur central du Service de santé des armées
  • : docteur en médecine, docteur ès lettres et sciences humaines, professeur de psychologie clinique et anthropologique à l'université de Paris-IV-Sorbonne-René-Descartes

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