PSYCHOTHÉRAPIES
Indication et évaluation des psychothérapies
Les prises en charge psychothérapeutiques sont extrêmement diversifiées, ce qui rend assez complexe la question du choix le plus pertinent de l’une d’entre elles, pour un patient donné. Comme le soulignent Pierre Pichot et Jean-François Allilaire dans leur rapport à l’Académie de médecine de 2003, elles « vont de l’utilisation de la parole comme unique vecteur de guérison jusqu’à l’adjonction de techniques diverses comme la médiation corporelle, la musique, l’art, le dessin, l’expression théâtrale par exemple », ces mesures pouvant être associées à des degrés divers. Comme le rappellent ces auteurs, elles se définissent soit en fonction de l’interlocuteur auxquels elles s’adressent (sujet, groupe, famille, couple…), soit en fonction du procédé qu’elles utilisent (psychodrame, musicothérapie, relaxation…), soit en fonction de la théorie à laquelle elles se réfèrent (behaviorisme, psychologie cognitive, psychanalyse…), sans même parler de la référence à leur durée, les thérapies dites « brèves » ayant ainsi tenté de se démarquer de certaines prises en charge jugées interminables.
L’objectif du soin étant, comme nous l’avons vu, de restaurer un état de bonne santé mentale, ses modalités prennent en compte la situation du sujet, la nature de son trouble et sa demande de soins. L’analyse de la problématique et la stratégie thérapeutique seront donc très différentes selon que le praticien reçoit un sujet âgé isolé ou un adolescent en situation de crise identitaire, sans dysfonctionnement social majeur, ou encore un jeune psychotique en proie à des hallucinations et présentant d’importants troubles du comportement pouvant entraîner une désocialisation, et selon qu’il vient seul, à son initiative, ou qu’il est accompagné par ses parents. Il est donc souhaitable qu’une première étape d’évaluation de la demande, et éventuellement de diagnostic, précède l’indication du soin. Puis il faut distinguer les différents niveaux d’intervention :
– l’aide, le réconfort, l’écoute, qui ne sont d’ailleurs pas nécessairement le fait d’un soignant et peuvent être prodigués par un « aidant naturel » (famille, proches, représentant d’un culte, milieu associatif…) ;
– le soutien et le conseil susceptibles d’être délivrés par les professionnels de la santé de manière adaptée à chaque cas et selon les compétences de chacun. Un médecin généraliste pourra, par exemple, faire des recommandations à un patient déprimé ou lui donner des informations sur son trouble en plus de son éventuelle prescription et de ses conseils ;
– le travail psychothérapeutique structuré, qui peut avoir différents objectifs, comme la simple disparition des symptômes ou une prise de conscience plus approfondie.
Le choix du niveau d’intervention est fonction de la demande du patient, de ses possibilités, de la nature de son trouble, de la disponibilité des thérapeutes autour de son lieu de résidence… De surcroît, plusieurs niveaux peuvent être conjugués. Longtemps, la question de l’évaluation des différentes techniques de psychothérapie a été laissée à la discrétion de leurs concepteurs qui se trouvaient donc être juges et parties. Même après avoir exclu les pratiques ésotériques, il est vite apparu nécessaire de soumettre les psychothérapies à l’évaluation de leur efficience et même à celle des risques auxquels elles pouvaient exposer – le suicide, par exemple. C’est aux États-Unis, à la fin du xxe siècle qu’est née cette démarche, notamment à l’initiative de certaines associations de patients qui estimaient avoir été mal soignés ou de familles de patients (notamment pour l’autisme). Elle s’est vite développée dans le monde anglo-saxon, au nom du pragmatisme, mais aussi de l’émergence de la notion juridique de « perte de chance » qui[...]
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Écrit par
- Frédéric ROUILLON : professeur de psychiatrie
Classification
Média