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PURITANISME

Puritanisme et capitalisme

Dans son célèbre ouvrage L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme, M. Weber analyse l'influence du protestantisme – et spécialement du puritanisme – sur le développement de l'esprit capitaliste. Selon lui, la doctrine calviniste de la prédestination créant une certaine angoisse, l'activité et le succès professionnels sont interprétés par le fidèle comme des signes de l'élection divine. Contrairement à ce qu'ont cru les historiens, les puritains condamnaient seulement la jouissance de la richesse, le repos dans la possession, non la recherche de biens terrestres par le travail ni la possession elle-même. Ainsi la dénonciation ascétique des dangers de la richesse aboutissait à une obligation religieuse de l'enrichissement.

Pour R. H. Tawney, les grandes découvertes et leurs conséquences économiques furent les causes essentielles du développement capitaliste. La Réforme, notamment sous sa forme puritaine, s'effectua dans le cadre de la montée des classes moyennes, de la mentalité marchande. Façonné par les structures économico-sociales, le puritanisme contribua cependant à renforcer celles-ci en les justifiant au nom de Dieu. L'esprit capitaliste « trouva dans certains aspects du puritanisme un élément qui vivifia son énergie et fortifia son tempérament ». Perry Miller, bien qu'agnostique, insiste sur l'importance de la théologie de la grâce, condition du dynamisme socio-économique des puritains. Au contraire, Larzer Ziff estime qu'en tant que classe ascendante industrieuse les puritains ont exprimé leurs aspirations égalitaires dans cette théologie. D'autres auteurs, par contre, ne pensent pas que le puritanisme ait présenté une aussi grande originalité. Selon W. Sombart, ce mouvement a eu une influence positive sur l'essor du capitalisme dans la mesure où il a repris des idées qui se trouvent exprimées avec « plus de force dans la religion juive qui, naturellement, en a aussi la priorité ». K. Samuelsson va plus loin et rejette l'idée que l'esprit du capitalisme puisse procéder, même partiellement, d'une influence religieuse quelconque. Pour lui, la mentalité capitaliste va de pair avec une sécularisation progressive de toutes les activités humaines.

Si pertinentes que soient ces différentes remarques, la thèse wébérienne ne semble pas pour autant réellement réfutée. Celle-ci insiste, en effet, sur les aspects spécifiques du capitalisme occidental moderne. C'est au niveau de l'organisation rationnelle et bureaucratique du travail formellement libre que le puritanisme a joué un rôle. Cette action se combina avec d'autres facteurs historiques. Or Weber prône précisément avec insistance une conception pluraliste de la causalité ; il montre, d'autre part, qu'il existe une différence entre le « capitalisme juif » orienté vers la spéculation – capitalisme de parias – et le « capitalisme puritain », qui fut une organisation bourgeoise du travail ; enfin, il ne nie pas l'importance du processus de sécularisation, mais il semble bien que l'« ascétisme séculier » des puritains ait favorisé ce processus alors que le catholicisme l'a, d'une manière générale, plutôt freiné. Le puritanisme fut, certes, une attitude caractéristique de la classe moyenne ascendante, mais, en théorisant des aspirations latentes, il a permis à la bourgeoisie protestante de jouer un rôle capital dans une organisation nouvelle de la production et dans la mise en place de nouveaux rapports de production.

— Jean BAUBÉROT

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Écrit par

  • : directeur d'études émérite du groupe Sociétés, religions, laïcités au C.N.R.S.

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La morale puritaine - crédits : MPI/ Archive Photos/ Getty Images

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