QING [TS'ING]LES, dynastie mandchoue (1644-1911)
Dernière maison impériale ayant régné sur la Chine, les Qing sont issus d'un groupe de tribus Tungus vivant dans les forêts de l'est de la Mandchourie, considérées comme vassales par les Ming, et fédérées à la fin du xvie siècle par Nurhaci (1559-1626), tenu pour le fondateur de la dynastie. La construction d'un État mandchou (le mot apparaît en 1636), fortement inspiré de l'exemple chinois mais possédant ses propres institutions tribales et militaires (le système des « Huit Bannières »), est son œuvre et celle de son fils Abahai (1592-1643). À la veille d'envahir la Chine, les Mandchous ont eu le temps de s'emparer des territoires Ming du Liaodong (les hostilités ont commencé en 1618), de lancer plusieurs raids meurtriers en Chine propre, d'établir leur suzeraineté sur la Corée et la Mongolie orientale et d'absorber de très nombreux Chinois dans leur armée et leur administration. En 1644, alors qu'ils font face à l'armée du général Wu Sangui à la passe de Shanhaiguan, ils s'entendent avec ce dernier pour combattre le rebelle Li Zicheng qui vient de prendre Pékin. Une fois entrés dans la ville, les Mandchous y établissent leur régime. L'empereur Shunzhi (règne de 1644 à 1661) étant encore enfant, le véritable artisan de la conquête de l'empire sera le régent, son oncle Dorgon.
Cette conquête est à la fois rapide et lente. Les armées sino-mandchoues s'emparent de Nankin, où se sont réfugiés les Ming, dès 1645, et les autres capitales provinciales du sud de la Chine tombent peu après. Mais si l'accueil des notables à ces nouveaux protecteurs de l'ordre est en général favorable, la résistance loyaliste n'en reste pas moins endémique pendant de nombreuses années, en particulier dans la vallée du Yangzi et le long de la côte sud-est. Le dernier des princes Ming, réfugié au Yunnan, est capturé et exécuté en 1662 à la frontière birmane, mais le pirate Koxinga continue la résistance à Taiwan. En 1673-1681 le jeune empereur Kangxi (règne de 1661 à 1722) doit affronter une vaste rébellion en Chine du Sud, menée par trois des généraux chinois (dont Wu Sangui) qui ont aidé les Mandchous à conquérir l'empire, mais refusent à présent d'être dépouillés de la quasi-autonomie dont ils jouissent dans leurs fiefs.
Les marches de l'empire sont conquises ou réduites à l'état de protectorat dans les décennies suivantes : prise de Taiwan (1683), protectorat sur l'actuelle Mongolie-Extérieure (1690-1691), sur le Tibet (1720), sur l'Asie centrale (ou Xinjiang) après de multiples expéditions contre les Mongols occidentaux (1696-1759). Le territoire ainsi constitué est le plus vaste jamais contrôlé par une dynastie chinoise et correspond à peu près à celui de l'actuelle république populaire de Chine.
Sur le plan intérieur, les Mandchous s'emploient à reconstruire l'État et l'économie sur des bases essentiellement empruntées aux Ming. Cherchant à se concilier les élites chinoises en les associant au gouvernement, ils se posent en continuateurs de la tradition et en protecteurs des arts et des lettres. Après les remous du début, la première moitié de la dynastie, soit essentiellement les longs règnes de Kangxi et de Qianlong (1735-1795), est une ère de paix et de prospérité comme la Chine en a rarement connue. Elle est notamment marquée par une très forte croissance économique et démographique (dès 1800 la population dépasse largement les 300 millions). L'administration est généralement efficace, surtout après les réformes de l'empereur Yongzheng (règne de 1722 à 1735), qui centralisent le gouvernement et rationalisent la fiscalité. L'empire mandchou au xviiie siècle est certainement le plus puissant du globe ; c'est aussi le plus admiré dans l'Europe des Lumières, qui le perçoit[...]
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Écrit par
- Pierre-Étienne WILL : directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales
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