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QUAND LES ARTISTES FONT ÉCOLE (ouvrage collectif)

Bien avant le site de création contemporaine qu'est devenu en 2002 le palais de Tokyo, avec son pavillon-école à destination des jeunes artistes confié à Ange Leccia, Paris avait abrité une pépinière exceptionnelle, celle de l'Institut des hautes études en arts plastiques dirigé entre 1988 et 1995 par Pontus Hulten, ancien directeur du Musée national d'art moderne. Là furent formés quelques-uns des meilleurs artistes d'aujourd'hui, selon un principe dérivé de celui du Bauhaus fondé en 1919 à Weimar par Walter Gropius ou, aux États-Unis, du Black Mountain College of North Carolina créé en 1933 notamment par Josef Albers, John Cage et Robert Rauschenberg : l'échange des plus jeunes avec leurs aînés. L'institut, soutenu par la Ville de Paris, par l'État et par quelques mécènes, a fermé ses portes en 1995, mais ses archives et sa bibliothèque, nourrie des fonds de l'historien de l'art Ernst Goldschmidt et spécialisée dans les catalogues d'exposition d'art contemporain, sont conservées à Marseille, où deux volumes ont été publiés, sous le titre Quand les artistes font école. Vingt-quatre journées de l'Institut des hautes études en arts plastiques (Ville de Marseille-éd. du Centre Georges-Pompidou, Marseille-Paris, 2004, t. I, 1988-1990, t. II, 1991-1992), retraçant les quatre premières sessions des séminaires.

C'était le vœu du président de la République Georges Pompidou que le centre qui portait son nom fût doté d'un espace de recherche : l'institut eut cette mission, et en constitua de fait le « cinquième département ». À la suite des grandes expositions organisées par Pontus Hulten, telles Paris-Berlin ou Paris-Moscou, à la fin des années 1970, la recherche y fut pluridisciplinaire. Les jeunes artistes plasticiens bénéficiant d'une bourse se trouvaient non seulement face à Jean Tinguely ou Jannis Kounellis, mais également au compositeur Luciano Berio ou aux cinéastes Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, Robert Kramer ou Raúl Ruiz. La « société civile » était également présente, avec des collectionneurs, des juristes, ou encore le biologiste Étienne-Émile Baulieu. Un noyau de permanents, formé de Sarkis, Daniel Buren et Serge Fauchereau, était rejoint par de très nombreux intervenants invités, parmi lesquels les meilleurs historiens de l'art et critiques, tel Benjamin Buchloh, et des artistes renommés, tels Michael Asher ou Hans Haacke, ainsi que des architectes (Renzo Piano, Jean Nouvel) ou des gens de théâtre, tous s'exprimant librement à propos de leur œuvre ou de leurs conceptions de l'art, de l'engagement, de l'exil, de la société. On y parlait aussi d'utopies, comme les Watts Towers (1921-1955) de Simon Rodia ou le Jardin des Tarots (1978-1998) de Niki de Saint Phalle.

Chaque session avait pour objet un thème fondamental, « La Situation de l'artiste » (1991) ou « Les Grands Projets : l'idée du monumental considérée d'une façon critique » (1991-1992). L'actualité d'expositions préparées par l'institut à l'étranger permettait de consacrer les premières sessions, de 1988 à 1990, au « Territoire de l'art », à Leningrad, et la cinquième, en 1993, à la question « Y a-t-il recherche dans l'art ? », en liaison avec une manifestation baptisée Devant le futur,à Taejon, en Corée du Sud – quand les sessions VI et VII avaient pour titre « Centre et Périphérie » et « De l'abri à l'utopie ».

L'édition d'un choix de vingt-quatre journées, dont les débats ont été patiemment retranscrits, et dont on peut apprécier la liberté de ton, offre au lecteur la possibilité de naviguer grâce à un agenda détaillé et à de copieux index (auxquels s'ajoutent quelques illustrations). Il peut ainsi se diriger en fonction de thèmes,[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art contemporain à l'université de Paris-X-Nanterre

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