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ALSACE-LORRAINE QUESTION D'

Le dénouement du problème

Le 7 août 1914, l'armée Dubail pénètre en Alsace. Mois d'août glorieux pour les Français, puis recul obligé. Alors commence la guerre de positions : quatre ans de combats meurtriers dans les Vosges. Pendant ce temps, en Alsace, le drame arrive à son paroxysme : près de deux cent cinquante mille Alsaciens et Lorrains seront mobilisés dans l'armée allemande ; mais dix-sept mille engagés volontaires dans les troupes françaises seront bientôt rejoints par de nombreux déserteurs. À Berlin on parle de trahison, et l'on envisage de rattacher l'Alsace à la Bavière ou à la Prusse. C'est l'époque des « proscrits » (condamnation des civils, déportations). Le Reichsland s'écroule dans la peur, la haine, le déchirement des familles. Les quelques politiciens qui rêvent encore sont réveillés brutalement par le Conseil central des travailleurs et des soldats, mis en place par la révolution du 10 novembre 1918. Les événements se précipitent : le 17 novembre, entrée délirante des Français dans Mulhouse, le 18 dans Colmar, le 22 dans Strasbourg. L'insoluble problème alsacien-lorrain va-t-il trouver son dénouement avec le retour de l'Alsace dans l'unité française ?

Il fallait, on l'a vu, tenir compte et du patriotisme sans tache des Alsaciens et de leur particularisme qui n'avait rien d'artificiel. On tenta, au lendemain de l'armistice, un essai d'organisation : création d'un Commissariat général puis d'un Conseil consultatif, dont l'existence devait se prolonger jusqu'en 1924. La réaction est immédiate, et deux tendances s'affrontent : l'opinion de gauche, hostile au Concordat et au statut spécial des écoles, est pour la suppression du Commissariat contre les régionalistes, défenseurs du Commissariat et de l'embryon d'autonomie qu'il représente.

En 1924, les divergences s'accusent à l'occasion de la déclaration du président Herriot sur le projet d'introduction de la législation laïque en Alsace. Le 9 mai 1925, l'hebdomadaire Die Zukunft consacre un numéro entier aux revendications d'une autonomie régionale. Le mouvement autonomiste entre dans sa phase active, entraînant une vive réaction : 1927, procès Haegy-Helsey qui soulève pour la première fois l'idée d'un complot ourdi par les autonomistes contre la sûreté de l'État. La même année, fondation du Parti autonomiste, suivie de l'interdiction de la presse autonomiste, de perquisitions et d'arrestations. Quel but se propose ce parti ? « Une Alsace-Lorraine libre comme membre des États-Unis d'Europe et médiateur entre la France et l'Allemagne. »

En fait, derrière les formules ronflantes se cachent des idéologies contradictoires et notamment la menace d'une certaine ingérence allemande. Cet aspect trouble n'a pas empêché le parti de se développer jusqu'en 1933. On assiste ensuite à la décomposition du mythe autonomiste ; en 1934, un groupe d'activistes pronazis entre au parti, les autonomistes de la première heure sont dépassés, comme l'attestent les Strassburger Monatshefte de janvier 1937 pour qui l'autonomisme s'inscrit dans l'idéologie de l'Allemagne nationale-socialiste et vise au retour de l'Alsace à la « patrie allemande ». Or cette position extrémiste n'est certainement pas celle de l'homme du peuple qui a voté autonomiste depuis la fondation du parti sans vouloir une politique séparatiste ni, surtout, proallemande, mais simplement parce qu'il tenait à un certain nombre de valeurs qu'il craignait de perdre dans un réajustement administratif aligné sur les autres départements français. De nouvelles épreuves allaient lui montrer ses erreurs.

Dès les premiers jours de septembre 1939, le tiers de la population[...]

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Écrit par

  • : licenciée ès lettres
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Allemagne, 1870-1871 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Allemagne, 1870-1871

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  • ALLEMAGNE (Histoire) - Allemagne moderne et contemporaine

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