RAIMBAUT D'AURENJA ou D'ORANGE (1146 env.-1173)
Raimbaut d'Orange (aurenja en langue d'oc) appartient à la catégorie des troubadours grands seigneurs comme le duc d'Aquitaine, Guillaume de Poitiers. Son activité littéraire se situe entre 1150 et 1173. C'est le premier troubadour né en Provence proprement dite. Par son père, Guillaume d'Aumelas (canton de Gignac, Hérault), il est suzerain d'importants domaines dans la région de Montpellier et de Maguelonne. Par sa mère, Tiburge, il est seigneur d'Orange. Il réside principalement près de cette ville, dans son château de Courthézon où il accueille en mécène les troubadours, ses confrères en poésie, notamment Peire Rogier et Guiraut de Bornelh. Il ne semble pas avoir éprouvé d'autre amour pour les dames que celui qui lui est prétexte à « trouver » et à exercer sa verve, son humour, sa virtuosité. Grand seigneur désinvolte, orgueilleux, amateur de vanteries et de plaisanteries, il aurait été aimé par la princesse de Die qui se plaint de n'être pas célébrée dans les chansons de Raimbaut. Pendant un quart de siècle il est l'un des plus féconds troubadours, mais aussi l'un des plus difficiles à cerner. Comme Guillaume de Poitiers, il apprécie le gab (galéjade) ; comme lui, il affecte souvent le détachement du grand seigneur en face de l'amour. il pratique le trobar clus (poésie hermétique) comme Marcabru, mais sans la note rude, vulgaire de celui-ci, qu'il remplace, au contraire, par une élégance hautement aristocratique, et sans vouloir, comme le plébéien Marcabru, moraliser. Il ne craint aucune exagération et se livre à toutes sortes de prestidigitations poétiques, si bien qu'on le traitera de jongleur, ce qui ne l'émeut nullement : il est assez grand seigneur pour se payer un tel luxe. Il ne craint pas davantage de montrer qu'il est capable de cultiver le trobar lèu, la poésie claire et facile aux rimes vils e planas (rimes communes et claires). Mais, aussi grand artiste qu'aristocrate capricieux, il aime la difficulté qui prouve la virtuosité, et il est le maître du trobar ric (poésie simple). Toutefois, sa virtuosité n'est pas seulement dans l'habileté à manier les mots, les rimes et les rythmes, à jouer de l'entrebescament (tissu aéré poétique), elle est au fond même de son génie, qui utilise cette habileté comme un outil de découverte. De l'étrange et de l'absurde, il tire des musiques surprenantes et fait naître une profonde émotion. Avec lui, les artifices de la rhétorique et de l'humour se changent en pure poésie.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Charles CAMPROUX : professeur honoraire à l'université Paul-Valéry, Montpellier
Classification
Autres références
-
GUIRAUT DE BORNELH (1140 env.-1199)
- Écrit par Charles CAMPROUX
- 574 mots
Poète de langue d'oc dont l'activité littéraire s'étend de 1165 à 1199, Guiraut de Bornelh est salué par ses contemporains comme le « maître des troubadours ». « Il fut meilleur trouveur qu'aucun de ceux qui ont été avant lui et qui furent après lui », dit la ...
-
OCCITANES LANGUE ET LITTÉRATURE
- Écrit par Pierre BEC , Charles CAMPROUX et Philippe GARDY
- 7 327 mots
- 1 média
...Au-delà de la monotonie de l'inspiration des épigones, ces diverses voix se feront entendre à travers les œuvres magistrales de Bernard de Ventadour, de Raimbaut d'Aurenja, de la comtesse de Die, de Peire d'Alvernha suivis de Giraut de Bornelh, Arnaud Daniel, Arnaud de Maruelh, Peire Vidal...