RĀMA
La divinisation de Rāma et l'apparition des sectes
Bien que, dans l'ordre des avatāra, Rāma soit apparu avant Krishna, sa geste semble être un reflet de celle de ce dernier, de même que la naissance du ramaïsme est postérieure à celle du krishnaïsme. Sa divinisation ne s'est opérée qu'après l'œuvre de Vālmīki, dans les livres I et VII du Rāmāyaṇa et dans le Mahābhārata récent ; elle s'est produite « étape par étape ». De celui de héros, Rāma accède au rang de demi-dieu, « puis la moitié de l'essence de Viṣṇu s'infuse en lui ». Plus tardivement encore se produit « l'extension théologique, avec surrection au rang suprême » (L. Renou) ; elle s'accompagne de la divinisation de Sītā, épouse de Rāma, comme un avatāra de Śri-Lakśmī, épouse de Viṣṇu, alors que Lakshmana, frère entièrement dévoué à Rāma, partagera sa divinité comme second avatāra de Viṣṇu.
Autour du thème de Rāma, une littérature d'une extraordinaire abondance s'est développée tout au long des siècles sans discontinuité jusqu'à l'époque actuelle ; elle a joué un rôle décisif dans l'organisation d'un culte ramaïte. Bien qu'elle atteigne tous les genres, elle est le plus souvent engendrée par le Rāmāyaṇa de Vālmīki. Des hymnes à la gloire de Rāma, destinés à être appris par cœur et chantés dans les temples, se sont multipliés. Tulsī-Dās, au xvie siècle, qui s'était entièrement voué à Rāma, considéré par lui comme le dieu suprême, écrivit dans cet esprit sa Gītāvalī, sorte de cantique dont les strophes célèbrent la vie du dieu. Et pour servir son rêve, qui était « de rassembler les forces vives de l'hindouisme autour du thème de Rāma et d'en tirer les éléments d'une foi vivante, apte à sauvegarder les traditions et à s'affirmer contre les menaces extérieures » (L. Renou), il composa son Rāmcaritmānas (cf. rāmāyaṇa).
À la récitation des passages de l'Épopée dans un but religieux et au chant des hymnes s'ajoutent de multiples réalisations dramatiques. Le théâtre joue le rôle d'auxiliaire de la foi. Il servit à manifester le personnage de Foi-en-Viṣṇu (Viṣṇu-bhakti) tel qu'on l'attendait, car « le besoin d'un dieu personnel et voisin de l'humanité pousse [...] les multitudes vers le culte des incarnations humaines » (S. Lévi).
Au xve siècle apparut la première secte d'inspiration strictement ramaïte, celle des Rāmānandīs. Opérant une réforme dans le vichnouisme, elle fit choix de Rāma comme divinité suprême et, afin d'être plus accessible, elle rejeta l'usage religieux du sanskrit pour adopter les langues vernaculaires. Elle devait donner naissance à un grand nombre de sectes nouvelles.
L'iconographie célèbre abondamment Rāma à travers toute l'Inde et le Sud-Est asiatique. Les sculptures des temples relatent son Épopée et le représentent – symboles de sa double appartenance, car il est à la fois un héros national et un dieu – sous l'aspect d'un kshatriya portant les armes, mais aussi avec la conque de Viṣṇu.
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Écrit par
- Marie-Simone RENOU : membre de l'École française d'Extrême-Orient, diplômée de l'École pratique des hautes études
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Médias
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