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RAMAḌĀN

Le neuvième mois lunaire du calendrier hégirien est ramaḍān. Mois sacré par excellence. « Le Coran a été révélé [m. à m. « est descendu »] durant le mois de ramaḍān » dit le Livre (Coran, ii, 185). Chaque jour du mois, depuis la venue de la nouvelle lune, doit être marqué par un jeûne strict (ṣawm, parfois ṣiyām). Le jeûne cesse quand l'apparition du premier quartier de la lune suivante est dûment constaté. Ramaḍān est donc à la fois fête du Coran et jeûne prescrit.

Ce dernier est un jeûne diurne qui doit être absolu depuis que l'aube permet de distinguer « le fil blanc du fil noir » et jusqu'à la nuit (Coran, ii, 187). Toute une casuistique extrêmement précise a été mise en place par la tradition et les écoles juridiques : conditions, exigences et limites du jeûne. Il serait trop long d'en énumérer les règles et d'évoquer les divergences selon les écoles. L'enseignement commun peut être résumé ainsi : pour que le jeûne soit valide, il faut en formuler l'intention (niyya), et s'abstenir avec soin de tout ce qui pourrait le rompre (al-mufṭirāt). Des cas de conscience ont été posés presque à l'infini pour déterminer ces mufṭirāt qui « briseraient » le jeûne. Le Coran prescrit l'absence totale de nourriture, de boisson et de relations sexuelles. Les traditions y joignirent toute entrée volontaire de substance étrangère dans le corps et toute évacuation de semen ou de sang. Aucune interdiction légale ne concerne les nuits de ramaḍān.

Une fois atteinte la puberté, nul n'est totalement dispensé du jeûne, obligation personnelle (farḍ al-‘ayn) pour tout croyant sain d'esprit. Seuls sont prévus des « allégements » : les malades en danger de mort sont dispensés ; peuvent l'être de même les personnes âgées. Mais ces malades, s'ils guérissent, et les vieillards doivent compenser le jeûne par des aumônes. La femme enceinte ou la nourrice, les malades qui ne sont pas en danger de mort, le voyageur (surtout si le voyage présente quelque difficulté), ceux enfin qui sont astreints à un travail pénible ont le droit de rompre le jeûne, mais ils sont tenus ensuite de remplacer scrupuleusement les jours omis, dès qu'ils le peuvent.

Le jeûne du ramaḍān est l'un des cinq « piliers » (arkān) de l'islam. Il engage la communauté. Tout au long du mois, la vie sociale revêt une note spécifique qui fait du jeûne un témoignage de la cité elle-même. Des musulmans qui ne pratiquent plus guère les prières quotidiennes continuent de jeûner. Des incroyants déclarés ne rompront pas le jeûne en public. De l'aube au coucher du soleil, la vie sociale est comme suspendue ; et, quand l'islam est religion d'État, il appartient à la police des mœurs (ḥisba) et même à la police gouvernementale (shurṭa) d'empêcher que l'on ne mange, ou ne boive, ou ne fume en public. Les conditions de vie du monde moderne, certains travaux industriels notamment, ne sont pas sans poser des questions nouvelles. Mais aucun consensus n'est intervenu pour modifier vraiment les pratiques traditionnelles.

Cette rigueur et cette unanimité, cette valeur sociale du jeûne ne contredisent pas la portée proprement ascétique et purificatrice, quasi sacrificielle, qu'aime à lui reconnaître, à la suite du Coran, la spiritualité musulmane. Sans doute les nuits de ramaḍān sont parfois l'occasion de réjouissances, voire de licences, dès lors qu'ont été remplies les strictes conditions du jeûne diurne. Mais les auteurs spirituels enseignent qu'il ne faut point passer tout le jour à dormir, qu'il faut rester sobre la nuit, qu'il ne faut point manger ou boire avec avidité dès le coucher du soleil, si l'on veut que le jeûne garde son vrai sens qui est de combattre les passions et de rapprocher l'âme de Dieu.[...]

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Écrit par

  • : ancien professeur au collège philosophique et théologique de Toulouse, co-directeur de la collection Études musulmanes, collaborateur de l'Encyclopédie l'Islam

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