RĀMĀYAṆA
C'est après les temps védiques, aux alentours de l'ère chrétienne, mais à une date qu'il est impossible de préciser, qu'apparut le Rāmāyaṇa, la « Geste de Rāma », ou la « Marche de Rāma », la seconde des deux grandes Épopées indiennes. Évoluant vers la poésie courtoise et réalisant une certaine unicité, le Rāmāyaṇa n'offre pas un récit parallèle à celui du Mahābhārata, œuvre collective, anonyme, beaucoup plus étendue, écrite dans une langue encore très archaïque et qui, tout en constituant la « Geste de Krishna », insère dans le corps de sa très longue histoire principale de bien plus nombreuses digressions. Attribué par la tradition à un seul auteur, Vālmīki, qui pour le composer a puisé dans le folklore tout en s'appuyant sur un léger fonds historique, le Rāmāyaṇa reprend plusieurs thèmes du Mahābhārata tels la descente du Gange sur la Terre et le symbole de l'arc prodigieux qu'aucun des prétendants ne pouvait même soulever et que brisa Rāma, conquérant ainsi Sītā, alors qu'Arjuna, l'un des Cinq Pāndava, s'était en manifestant son adresse vu choisir par la belle princesse Draupadī. Plus qu'aucune autre œuvre indienne, le Rāmāyaṇa a connu dans l'Inde même et dans les pays qu'elle influença une immense diffusion. Traduit, commenté, adapté, découpé, c'est à lui que revient l'extension du culte ramaïte.
Vālmiki et le « Rāmāyaṇa »
La légende décrit Vālmīki comme un homme de naissance modeste, mais génial, qui aurait vécu à la cour d'Ayodhyā, au nord du Gange, dans le pays même où il situera le roi Dacharata, le père de Rāma.
En un texte sanskrit destiné à être tour à tour chanté et parlé et comprenant sept kānda ou « livres », que divisent 645 sarga ou « chants », il célébra en 24 000 śloka, « distiques », les exploits de Rāma. L'invention du śloka, vers caractéristique de l'épopée, lui est aussi attribuée. Son œuvre achevée, il se retira dans la forêt pour y mener l'existence d'un ascète ; il y atteignit, dit encore la légende, une si admirable immobilité contemplative qu'une fourmilière (valmikā) vint le recouvrir, ce qui lui valut son nom de Vālmīki, « Fils de la fourmilière ».
Le livre I du Rāmāyaṇa, appelé Bālakānda, « Section de l'enfance », ou encore Ādikānda, « Commencement », chante la naissance divine, l'enfance et le mariage de Rāma. À Ayodhyā (moderne Oudd), capitale du pays de Kosala, le roi Daśaratha, sans descendance, célèbre le sacrifice du cheval, pour se concilier la bienveillance des dieux. De ses trois épouses, il aura quatre fils. L'aîné, Rāma, est en réalité l'avatāra de Vishnu, et il sera pourvu de toutes les vertus et d'une force exceptionnelle : pour récompense de sa force dans le maniement de l'arc, le roi de Videha, Janaka, lui accordera en mariage sa fille la princesse Sītā. Ce prélude est entrecoupé par l'exposé des grands thèmes mythologiques déjà présents dans le Mahābhārata : naissance du dieu Kumāra, descente du Gange sur la Terre, barattement de la mer, etc.
Dans le livre II, Ayodhyākānda, le « Livre d'Ayodhyā », le choix de Rāma, l'aîné des princes, comme héritier, par son vieux père Daçaratha suscite la jalousie de l'une des reines, Kaikeyī, mère de Bharata. Par ruse, elle obtient le bannissement de Rāma pour une durée de quatorze années et la promesse du trône pour son propre fils.
Le livre III, Aranyakānda, est celui de la forêt. Rāma, suivi de son épouse Sītā et de son frère Laskhmana, s'enfonce dans la forêt de Dandaka et s'y installe. Il engage, à la prière des ermites qui implorent sa protection, une lutte sans merci contre les Rāksasa ou démons qui l'infestent. Leur chef, Rāvana, à la demande de sa sœur la démone Śurpanakhā,[...]
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Écrit par
- Marie-Simone RENOU : membre de l'École française d'Extrême-Orient, diplômée de l'École pratique des hautes études
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