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RAP, musique

Le premier âge d’or du rap

On compte parmi les premières stars du rap des artistes comme Kurtis Blow (auteur de « Christmas Rapping », sorti à quelques jours d’intervalle avec « Rapper’s Delight »), le groupe Cold Crush Brothers, les Furious Five (cinq rappeurs qui accompagnent Grandmaster Flash) ou encore Funky Four + One (qui comprend une rappeuse). Leurs points communs sont des textes anecdotiques surtout conçus pour donner envie de danser. En effet, à ses débuts, le rap n’est pas une musique militante ou politique mais qui se veut essentiellement festive.

Le tournant s’opère en 1982 avec « The Message », signé Grandmaster Flash & The Furious Five, récit apocalyptique d’un quartier rongé par la drogue et la violence. Ce titre rappé par Melle Mel et Duke Bootee lance ce que l’on va appeler le « rap conscient ». Il raconte la misère et la répression accrue qui vont marquer les années Reagan, sous la présidence duquel les ghettos noirs voient leur situation empirer, notamment avec l’arrivée du crack, dérivé dévastateur et extrêmement addictif de la cocaïne. L’année 1982 est également celle de la sortie de « Planet Rock », signé Afrika Bambaataa & The Soulsonic Force et produit par Arthur Baker (à qui l’on doit notamment le titre « Blue Monday » de New Order). Avec le sample d’un extrait de « Trans-Europe Express », conçu en 1977 par le groupe pionnier de musique électronique Kraftwerk, « Planet Rock » annonce la révolution électro. Le rap, qui utilisait les rythmiques de James Brown et les échantillons de groupes de funk et de soul, va progressivement adopter un style plus synthétique, une évolution qui accompagne celle de la technique et l’utilisation progressive des ordinateurs. En effet, les échantillonneurs de sons (ou samplers) et les boîtes à rythmes permettent toutes les audaces. Ils ouvrent également l’accès de la production à des DJ qui n’ont pas de maîtrise technique de la musique et du solfège mais possèdent un instinct et une parfaite connaissance des disques qu’ils recyclent pour fabriquer de nouveaux sons.

Public Enemy - crédits : Mark Allan/ AP/ SIPA

Public Enemy

En 1984, Rick Rubin, un étudiant blanc fan de hard rock et de rap, et Russell Simmons, promoteur noir de rap et manager de Kurtis Blow, fondent le label Def Jam, une structure indépendante qui va lancer des artistes majeurs tels que les Beastie Boys, le premier groupe blanc du hip-hop, et Public Enemy, artisan d’un rap politisé et volontiers polémique. La première star de Def Jam est le jeune LL Cool J. Il n’a que seize ans quand sort son premier titre, « I Need a Beat », et montre avec le tube radio « I Need Love » que le rap peut être aussi une musique « romantique ». Le hip-hop connaît alors une période très féconde. Run-DMC revient aux racines du genre avec des arrangements bruts et une rythmique plus emphatique, ajoutant des guitares rock aux beats. Le premier album, éponyme, du groupe sort en 1984. Sur RaisingHell, leur plus gros succès commercial, on trouve le titre « Walk This Way », tube de l’année 1986 écrit en collaboration avec le groupe de rock Aerosmith. Parallèlement, le duo new-yorkais Eric B. & Rakim annonce le gangsta rap avec des textes radicaux et des rythmiques hypnotiques sur un tempo ralenti. Leur album Paidin Full (1987) est devenu un classique. Enfin, avec ses trois premiers albums, Yo! Bum Rush the Show, It Takesa Nation of Millions to Hold Us Back et Fear of a Black Planet, sortis respectivement en 1987, 1988 et 1990, Public Enemy innove : le son du groupe, un mille-feuille de samples empilés pour créer un mur de son « rapologique », parallèle à celui que créa Phil Spector dans la pop music, est l’œuvre du collectif The Bomb Squad. Les paroles, ou lyrics, de Chuck D sont celles d’un tribun qui défend le Black Power et la Nation of Islam, sulfureuse organisation dirigée par le très controversé Louis Farrakhan, un des instigateurs[...]

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Public Enemy - crédits : Mark Allan/ AP/ SIPA

Public Enemy

<em>Ghost Dog</em>, J. Jarmusch - crédits : Abbot Genser/ Artisan Pics / The Kobal Collection/ Aurimages

Ghost Dog, J. Jarmusch

The Roots au « Tonight Show Starring Jimmy Fallon », 2016 - crédits : Andrew Lipovsky/ NBC/ NBCU Photo Bank/ Getty Images

The Roots au « Tonight Show Starring Jimmy Fallon », 2016

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