RAPATRIÉS
Les mouvements induits
Les indigènes auxiliaires
Les auxiliaires de la colonisation sont inexorablement entraînés dans le reflux des communautés européennes.
Les plus compromis avec l'ancienne puissance étaient les militaires de carrière et surtout les supplétifs, hâtivement recrutés pour combattre les guérillas et le terrorisme, prélude aux décolonisations.
Le problème se posa d'abord pour les éléments indigènes de la K.N.I.L. (Forces armées royales d' Indonésie) dissoute en juillet 1950. Ils refusèrent à la fois d'entrer dans la nouvelle armée indonésienne, d'être démobilisés sur place, d'accepter l'autorité nouvelle. Leur soulèvement marqua les premières années du nouvel État. À un premier convoi de 5 000 rapatriés succédèrent d'autres arrivées jusqu'en 1957.
À la mi-septembre de cette année, on comptait 17 500 réfugiés d'Amboine ( Moluques) vivant dans des camps en Hollande. Leur nombre sera estimé en 1970 à environ 30 000, porté par l'accroissement naturel à près de 35 000 en 1975. La plupart continuaient de refuser à la fois l'intégration à la métropole et la soumission à l'Indonésie réclamant la reconnaissance d'une République moluquoise indépendante (R.M.S.). Leurs manifestations, plus ou moins violentes et spectaculaires (attaques de trains, enlèvements, etc.), se multiplièrent dans les années 1970 malgré les efforts du gouvernement de La Haye pour faciliter le retour en Asie comme pour aider l'insertion dans la société hollandaise.
Le même problème des militaires indigènes provoqua les plus grandes difficultés de la décolonisation britannique, notamment en Inde. Des accords anglo-indien et anglo-népalais permirent le transfert à l'armée anglaise de huit bataillons de Gūrkhas (10 000 hommes) de l'ancienne armée des Indes et la poursuite, limitée, du recrutement dans un groupe ethnique qui n'avait cessé de fournir les meilleurs éléments militaires locaux. L'accord fut renouvelé en 1953, puis en 1958.
Le cas le plus important par ses effectifs et le plus dramatique par ses conditions fut celui du retour des harkis, les musulmans d' Algérie engagés du côté de l'armée française dans la lutte contre le F.L.N. Réfugiés en France, ayant opté pour la nationalité française, ils représentaient, avec leur famille, de 150 000 à 200 000 personnes. Leur situation précaire entre deux communautés dont l'une, d'accueil, reste peu sensible à leurs problèmes et dont l'autre, d'origine, les considère comme traîtres et refuse de leur reconnaître toute existence fait naître inquiétude, incertitude et amertume qu'expriment leurs deux associations, la Confédération des Français musulmans rapatriés d'Algérie, le Front national des rapatriés de confession musulmane.
Encore que moins aigu, le problème se retrouve au Portugal dont plus de la moitié des troupes combattant outre-mer à la veille de l'indépendance était de recrutement indigène (de 75 000 à 80 000). Il fallut ramener, sous protection, en toute urgence, ceux de São Tomé, de Príncipe et du Cap-Vert.
Les intermédiaires allogènes
Aux indigènes auxiliaires il convient d'ajouter tous les allogènes ayant un rôle d'intermédiaire entre les colonisateurs et les colonisés. Entraînés dans le mouvement de repli des communautés dont ils vivaient ou expulsés par les nouveaux États qui les assimilaient à l'ancienne domination, ils sont plusieurs centaines de milliers à chercher de nouveaux établissements. Tout un monde de réfugiés-rapatriés offre ainsi sur un fond général de désarroi une gamme étendue de cas particuliers.
Un des plus dramatiques sans doute est celui des Asiatiques, essentiellement celui des Indiens installés dans les colonies britanniques.
Dans les premières années de la décolonisation,[...]
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Écrit par
- Jean-Louis MIÈGE : professeur émérite d'histoire à l'université de Provence
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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