POINCARÉ RAYMOND (1860-1934)
Issu d'un milieu bourgeois et intellectuel, Raymond Poincaré est élu conseiller général, puis député du département de la Meuse en 1887. Au Parlement, il est très rapidement un des hommes dont l'autorité égale la compétence. À trente-six ans, il a été déjà trois fois ministre : aux Finances en 1893 et en 1894, à l'Instruction publique en 1895. Il est ambitieux et sait être prudent. L'affaire Dreyfus divisant l'opinion, il se réserve et attend. La lutte anticléricale divisant les Français (1902-1905), il s'abstient de prendre parti. Avocat célèbre à Paris, on forge autour de lui l'image du patriote lorrain et du politique désintéressé. Il est d'une parfaite honnêteté, son prestige intellectuel est grand. Sincèrement laïque et rationaliste, il est accepté par la gauche ; partisan d'une orthodoxie économique et financière, il est adversaire de l'impôt sur le revenu et plaît aux modérés. Timide et froid a-t-on dit, pourtant il aime convaincre. Dès 1899, on lui avait offert la direction du gouvernement. En 1903, il préférait le Sénat à la Chambre des députés et allait y représenter la Meuse jusqu'en 1913. En 1906, il est élu à l'Académie française. En janvier 1912, Fallières le nomme président du Conseil. Il succède à Caillaux, qui dit de lui : « Il est armé pour exercer le pouvoir [...]. De haute culture, supérieur par le savoir à la plupart des politiques de sa génération, sinon à tous. Formidable puissance de travail... » À la politique pacifique de ce dernier Poincaré oppose une politique de fermeté à l'égard de l'Allemagne et, s'attribuant le portefeuille des Affaires étrangères, resserre les alliances françaises : l'Entente cordiale et l'alliance franco-russe. À l'intérieur, il fait aboutir une réforme électorale complexe comportant le scrutin de liste avec représentation proportionnelle. Homme d'autorité partisan d'un renforcement de l'influence du président de la République, il est élu le 17 janvier 1913 par le Congrès à la succession de Fallières. Barthou lui succède à la présidence du Conseil et Poincaré s'attache à poursuivre sa politique étrangère. Il est un des partisans de la loi sur le service militaire de trois ans. Les élections de 1914 amènent un succès de la gauche. Poincaré choisit Viviani pour la présidence du Conseil. En juillet 1914, au cours d'un voyage en Russie, il apprend que l'Autriche-Hongrie a adressé à la Serbie un ultimatum. Il revient en France, où il est le symbole de l'Union sacrée ; mais c'est son vieil adversaire Clemenceau qui sera le « Père la Victoire ». Impatient de jouer de nouveau un rôle politique, il renonce à solliciter un second mandat présidentiel en 1920. Réélu sénateur de la Meuse, il devient président de la commission des Réparations, dont il démissionnera par intransigeance à l'égard de l'Allemagne. En 1921, président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, il provoque la démission de Briand, soupçonné de mollesse lors de la conférence de Cannes sur les réparations de guerre. Il redevient président du Conseil de janvier 1922 à juin 1924 et se présente comme l'homme de « l'exécution intégrale du traité de Versailles ». En janvier 1923, il décide l'occupation de la Ruhr par les troupes françaises, ce qui isole la France sur le plan international. À l'intérieur, la crise financière amène Poincaré à utiliser pour la première fois la procédure des décrets-lois à la place de mesures normalement adoptées par les Chambres. En 1924, le Cartel des gauches lui enlève le pouvoir, mais la question financière lui redonne en 1926 la possibilité de se présenter comme l'homme de l'union nécessaire. Il est solide, certes, mais habile ; André Siegfried a écrit de lui que « les[...]
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Écrit par
- Armel MARIN : metteur en scène, conseiller en éducation populaire et techniques d'expression
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Médias
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