RÉACTEURS NUCLÉAIRES À SELS FONDUS
Réacteurs à sels fondus en cycle du combustible thorium
Les réacteurs à sels fondus (R.S.F. en français), sur lesquels des recherches sont notamment menées au sein du laboratoire de physique subatomique et de cosmologie (L.P.S.C.) de Grenoble, constituent donc une alternative aux réacteurs à neutrons rapides caloportés au sodium. Ils ont pour principale caractéristique d'utiliser un combustible sous forme liquide, un sel fluorure, celui-ci jouant aussi le rôle de caloporteur.
Les études historiques réalisés par le Oak-Ridge National Laboratory (Tennessee, États-Unis) dans les années 1960 sur les réacteurs à sels fondus et, en particulier, le projet nommé Molten Salt Breeder Reactor (M.S.B.R.), d'une puissance de 1 GW électrique, ont servi de base de travail pour le L.P.S.C. Ce dernier a analysé le M.S.B.R. et mis en évidence ses limites, tant du point de vue de sa trop grande complexité, qui le rendait irréalisable, que de son manque de sûreté intrinsèque. À partir de là, l'objectif a été de définir un concept novateur, satisfaisant tous les critères de la génération IV sans présenter d'inconvénient majeur identifié.
Ce nouveau concept de réacteur – fondé sur le cycle du combustible thorium et uranium 233, et sur un spectre neutronique rapide – a été nommé Thorium Molten Salt Reactor Non Moderated (T.M.S.R.-N.M.). D'une puissance de 2 500 MWth, il fonctionne à une température comprise entre 650 0C et 800 0C, ce qui correspond à un rendement thermodynamique de 40 à 50 p. 100. Le cœur du réacteur est un simple canal de diamètre interne égal à sa hauteur, dans lequel les réactions de fission ont lieu dans le sel fluorure en mouvement ascendant (fig. 1 et 2). Deux tiers du sel combustible sont localisés dans le cœur, le tiers restant circulant hors du cœur, dans les tuyauteries, les pompes et les échangeurs de chaleur. Le sel combustible effectue un tour de circulation complet en quelques secondes.
Le réacteur proprement dit est constitué de l'ensemble des parties du système contenant le sel combustible, soit le circuit primaire au complet composé du cœur, des tuyauteries, des pompes et des échangeurs de chaleur. Il représente la première barrière de confinement du combustible dans le principe de défense en profondeur. L'ensemble du réacteur est contenu dans une cuve qui matérialise la seconde barrière de confinement. Des réflecteurs axiaux et radiaux en acier, composés d'un alliage spécial à base de nickel, entourent l'ensemble du cœur afin de protéger les structures externes des effets d'irradiation causés par les neutrons sortant du réacteur. Le réflecteur radial contient en plus un second sel, dit sel fertile car contenant du thorium, afin d'améliorer la production de matière fissile en capturant de manière utile les neutrons s'échappant du cœur.
Comme pour tout réacteur nucléaire de génération IV, une unité de retraitement est indispensable pour la gestion et le recyclage du combustible. Dans le cas du T.M.S.R.-N.M., celle-ci est associée au réacteur sur le site, ce qui évite des transports de matières radioactives. Par ailleurs, le combustible étant liquide, il est possible, au cours du fonctionnement du réacteur, de ponctionner chaque jour un petit volume de sel pour le retraiter puis le réinjecter. Toutefois, la configuration du T.M.S.R.-N.M. est telle que, bien qu'indispensable pour le fonctionnement à long terme du réacteur, ce retraitement n'a pas d'influence notable sur son fonctionnement à court terme. Ainsi, un dysfonctionnement de l'unité de retraitement entraînant son arrêt sur plusieurs semaines, n'imposerait pas forcement un arrêt du réacteur lui-même.
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Écrit par
- Daniel HEUER : directeur de recherche au C.N.R.S., IN2P3
- Elsa MERLE-LUCOTTE : docteur ès sciences, enseignante-chercheur, Phelma-I.N.P.G.-L.P.S.C.-IN2P3, C.N.R.S.
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