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RÉALITÉ PHYSIQUE

Durant le xxe siècle, les principes fondamentaux de la physique ont perdu les couleurs de fausse évidence qui étaient les leurs au début de l'ère scientifique. C'est là la contrepartie de l'ordre qu'ils confèrent maintenant à des secteurs très étendus du système des connaissances.

Une analyse très sommaire permet déjà de distinguer deux niveaux dans ce processus de dépassement de la vision du sens commun. Le premier comporte l'abandon – imposé par les faits et leur synthèse cohérente – de certaines idées familières. Le second est plus radical encore. Il met en question la hiérarchie même des rapports de la réalité et du savoir.

Le dépassement des idées familières

Les progrès conceptuels dus à la théorie de la relativité et certains de ceux dus à la mécanique quantique ont – à un premier niveau déjà très important – entraîné le dépassement d'idées naïves.

Ce n'est pas que, à proprement parler, la relativité soit à l'origine de ce mouvement. De tout temps, la science a révélé à ses adeptes le caractère circonstantiel, pratique et par conséquent révisable de bien des notions que l'homme est instinctivement porté à ériger en absolu. La découverte, très ancienne, de l'isotropie de l'espace est un exemple de cela (que l'on se remémore à ce sujet la place des catégories « debout » ou « couché » dans les philosophies primitives). Il faut reconnaître cependant que, durant l'ère prérelativiste, la plupart des notions de base qu'utilisaient la physique et les autres sciences étaient des concepts empruntés presque sans changement à l'expérience familière : les atomes étaient des grains, la lumière était faite de vagues. En démontrant l'inadéquation à la description du réel observé de certaines notions de ce type – espace euclidien, temps absolu –, la relativité a donc bien donné le signal d'une évolution essentielle.

Toutefois, la relativité n'a pas eu seulement ce type d'implication pour la pensée. Par exemple, l'une de ses conséquences générales, qu'Einstein rangeait parmi les plus significatives de toutes, fait échec à certaines des vues de Kant. Ce dernier espérait trouver la solution de problèmes, très réels et encore pendants, de la théorie de la connaissance, en établissant que la réalité fondamentale, la « chose en soi », ne peut être connue des hommes. Ceux-ci ont dans l'esprit des « cadres a priori » dans lesquels ils ne peuvent faire autrement que d'insérer leur expérience. Ces a priori sont absolus et immuables. L'espace euclidien et le temps absolu en font partie.

Il est clair que la théorie de la relativité contredit la dernière des affirmations précédentes. Elle considère en effet l'espace et le temps comme des propriétés du monde physique, ni plus ni moins dépendantes, par conséquent, que n'importe quelle autre du monde physique, de nos modes de perception.

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre de l'Institut (Académie des sciences morales et politiques)

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