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RÉCIFS CORALLIENS

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Des coraux menacés

Si le squelette du corail est robuste et enregistre toutes les variations du milieu, le corail vivant est fragile et victime de nombreuses agressions, naturelles ou anthropiques, qui, au mieux, le perturbent et, au pire, le tuent.

Une fois morts, les coraux sont vite recouverts par des algues. Brisés, les coraux sont aussi roulés par la mer jusqu'à leur transformation en sable blanc plus ou moins fin. Un récif endommagé met une quinzaine d'années pour se reconstruire, sans pour autant retrouver systématiquement la diversité spécifique d'origine.

Prédateurs naturels

L' étoile de mer épineuse, Acanthaster planci, est un redoutable prédateur du corail. D'un diamètre moyen de 25 à 35 centimètres à l'âge adulte, elle est observée dans les océans Indien et Pacifique, mais est absente des Caraïbes (océan Atlantique). Ayant une prédilection pour les polypes de coraux, notamment ceux d'Acropora, elle se nourrit la nuit et peut consommer entre 5 et 6 mètres carrés de corail par an. Un récif corallien en bon état peut supporter de 15 à 30 étoiles de mer épineuses à l'hectare. Depuis les années 1970, on observe des pullulations dont les causes sont mal connues. Ce phénomène a été particulièrement important sur la Grande Barrière australienne dans les années 1970 et 1980 ou en 1983 en Nouvelle-Calédonie. Le prédateur d’Acanthaster est un mollusque gastéropode, Charonia tritonis, appelé communément conque ou toutoute.

Certains poissons se nourrissent également de coraux. Parmi ces corallivores, on peut citer le lime à tache orange, Oxymonacanthus longirostris, et le poisson-perroquet, Scarus spp. Ce dernier, dont les dents soudées forment un bec massif comme celui de l'oiseau du même nom, gratte les algues sur le corail et sur les rochers en y laissant des traces caractéristiques. Ses molaires broient les aliments. Il n'a pas d'estomac, mais un intestin distendu, et excrète le squelette des coraux sous forme de sable.

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Les coraux sont aussi victimes d'attaques bactériennes se manifestant par l'apparition dans le squelette de bandes noires ou blanches visibles à l'œil nu.

Cyclones et tsunamis

Plus gros destructeurs naturels des récifs, les cyclones et les fortes dépressions s'accompagnent de houles cycloniques brisant les coraux dont les débris roulés par les vagues participent à la formation des îles coralliennes.

L'impact le plus insidieux et le plus nocif d'un cyclone est celui de la sédimentation qu'il provoque. Les boues et autres apports terrigènes charriés par les rivières en période cyclonique se déversent dans les lagons, asphyxient et tuent les coraux et autres organismes fixés.

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En décembre 2004, l'Asie du Sud-Est a fait la dramatique expérience de l'action dévastatrice d'un tsunami et ses récifs coralliens n'ont pas été épargnés.

Blanchissement et variations climatiques

Les coraux sont sensibles aux variations de température de l'eau provoquées aussi bien par le changement climatique que par le phénomène El Niño. Ce dernier se caractérise par une élévation de la température de l'eau, notamment à l'est du Pacifique sud, et s'accompagne de variations de la pression atmosphérique entre l'est et l'ouest du Pacifique sud, d'où le nom d'E.N.S.O. (El Niño-Southern Oscillation) donné à ce phénomène climatique.

Le changement climatique naturel semble accéléré par les activités humaines comme le soulignait, dès 1957, le professeur Roger Revelle (1909-1991), océanographe américain qui tirait la sonnette d'alarme sur les conséquences des émissions de gaz à effet de serre.

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Aujourd'hui, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (G.I.E.C.), créé en 1988, affirme « qu'il est nécessaire de réduire bien avant la fin de ce siècle les émissions globales sous le niveau de 1990, à 450 ppm (partie par million). Ce niveau correspondrait à une élévation de température du globe d'environ 2 0C et permettrait d'éviter dans la durée sinon la perte des écosystèmes coralliens (affectés dès 1 0C de réchauffement moyen), du moins des événements de très grande ampleur... »

Les conséquences de ces variations de température se traduisent par un phénomène de blanchissement. En effet, lorsque le corail est soumis à un « stress », qui est lié à une modification naturelle ou anthropique de ses exigences écologiques (eau trop chaude, variation de salinité, forts ultraviolets, pollution...), l'association algue-corail est rompue : l'expulsion des zooxanthelles par leur hôte entraîne un blanchissement, changement rapide ou graduel de la couleur naturelle des coraux qui deviennent ainsi d'un blanc lumineux, d'un rose, jaune ou bleu pâle fluorescent. Les polypes peuvent, si le stress ne dure pas trop longtemps, régénérer une population de zooxanthelles et reprendre une vie normale, sinon ils meurent.

L'augmentation de la température des eaux tropicales lors du phénomène El Niño de 1998 a eu pour conséquence un fort blanchissement des coraux de l'océan Indien et du Pacifique. Selon le Réseau mondial de surveillance des récifs, ce blanchissement aurait touché 16 p. 100 des coraux, dont 6,4 p. 100 ont aujourd'hui totalement récupéré ou sont en cours de récupération. Les récifs sains semblent se remettre plus rapidement que ceux qui sont déjà dégradés par l'apport de sédiments et par la pollution dus à l'industrie littorale et au défrichement. Ainsi, le blanchissement a eu un effet dévastateur sur les récifs des Maldives, du Sri Lanka et des côtes ouest de l'Inde.

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Dans la zone des Caraïbes, l'année 2005 a été l'une des plus chaudes depuis 1880 et a été marquée par de nombreux ouragans. Ces perturbations climatiques ont provoqué un fort blanchissement des coraux de cette région, notamment aux îles Caïman, en Jamaïque, à Cuba et dans les Antilles françaises.

Par ailleurs, si le taux de dioxyde de carbone (CO2) continue d'augmenter dans l'atmosphère, sa dissolution croissante dans l'eau de mer entraînera une augmentation de l'acide carbonique (H2CO3), ce qui provoquera une acidification de l'eau de mer. En effet, l'eau, en se combinant avec le CO2, forme de l'acide carbonique qui a la particularité de dissoudre le carbonate de calcium dont sont constitués notamment les squelettes des coraux. Cette acidification croissante des océans entraînera une modification de l'écosystème corallien, voire sa disparition.

Les experts du climat estiment que, avec le réchauffement climatique global, les phénomènes extrêmes comme les pluies et les cyclones devraient s'accentuer. De ce fait, les sédiments et matières polluantes charriés par les rivières seront en augmentation et participeront à l'asphyxie rapide des coraux. Si la température de surface augmente, on assistera, en plus des phénomènes de blanchissement des coraux provoquant la dégradation et la perte des récifs actuels, à une modification de la distribution des coraux sur la planète.

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Si le niveau de la mer augmente (entre 15 et 95 cm en 2100), les coraux pourraient compenser et s'adapter à la seule condition que leur taux de calcification se maintienne, ce qui dépend de l'augmentation du CO2.

On constate déjà que l'élévation du niveau de la mer a touché des pays insulaires coralliens, comme Tuvalu, dont les habitants se sont réfugiés en Australie. L'Australie et la Nouvelle-Zélande, sollicitées en 2008 par des O.N.G., étudient la mise en place, au cours des trente ans à venir, de mesures de gestion du problème des réfugiés climatiques de ces pays insulaires.

Les activités humaines directes

La surpopulation et ses conséquences ont un impact négatif rapidement visible sur l'état de santé des récifs de la planète. L'accroissement démographique le long des côtes provoque une pression non soutenable sur les ressources côtières et entraîne une surpêche chronique, une surexploitation des ressources causant la disparition d'espèces, ainsi qu'une pollution des eaux liée à un aménagement intensif du littoral.

Le vent, les eaux de ruissellement et les rivières véhiculent des sédiments, des produits chimiques et des déchets qui se retrouvent sur les récifs et dans les mangroves en aval des bassins versants. Tous ces éléments occultent la lumière nécessaire aux zooxanthelles symbiotiques du corail et, en se déposant, étouffent les polypes des coraux. De même, les engrais issus des activités agricoles favorisent le développement d'algues qui entrent en concurrence avec les coraux pour l'espace et finissent par les étouffer.

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Écrit par

  • : ingénieure de recherche, habilitée à diriger des recherches, chargée des relations avec l'outre-mer au Muséum national d'histoire naturelle, Paris

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